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vendredi, 15 juillet 2016

Prairie Journal, de Christian Cottet-Emard

Les éditions Orage-Lagune-Express, en sommeil depuis quelques années, viennent de renaître avec la publication de deux ouvrages, dont le journal de Christian Cottet-Emard.

cce.jpgPlus de 400 pages de carnets rassemblées, un choix de textes qui ont pour la plupart précédemment paru sur le blog de l’auteur. « En 2005, à quarante-six ans, un homme se détournait de tout engagement social et professionnel. À l’horizon de sa prairie, il tient désormais un journal depuis une décennie. »

La prairie est bien présente dans cet ouvrage, car l’auteur vit à la campagne, dans le Jura. Observateur amoureux de la nature, du cycle éternel des saisons et de leurs infimes variations, il décrit avec autant de précision que de poésie son proche environnement, la forêt, les animaux, dont le renard et les sangliers qui viennent rôder devant sa maison, les arbres, les oiseaux, la neige, les fleurs et jusqu’à « l’éclosion des anémones pulsatiles dans la cendre noire des premiers écobuages ».

Prairie Journal est le titre d’une œuvre musicale d’Aaron Copland. Un hommage que l’auteur rend à l’un de ses compositeurs favoris. La musique tient une grande place dans sa vie. De longues heures se passent à écouter Edward Elgar, William Walton, Bach, Rachmaninov, Rimsky-Korsakov, Prokofiev, Tchaïkovski… et à lire de grands auteurs, dont Pessoa.

Les souvenirs sont très présents, dont ceux relatifs à l’enfance, à l’école primaire, pas toujours heureux, à la maison familiale aujourd’hui vendue. Mais l’auteur a trop de pudeur pour que ce soit un journal intime exhibitionniste et suffisamment de recul sur soi pour ne pas se prendre pour le centre du monde. Au fil de ces chroniques du temps qui passe, d'une belle écriture, on apprend bien des choses sur l’édition, le journalisme, la littérature, Lisbonne, le Portugal et le cigare (dont l’art de l’allumer sans en noircir la cape délicate !)

« Écrire un journal, c’est suivre sa route en gardant un œil dans le rétroviseur. » Si la nostalgie et la mélancolie sont largement présentes, l’humour traverse parfois ces carnets, dans la veine d’un précédent recueil de l’auteur, Tu écris toujours ? Ainsi quand Cottet-Emard, grand amateur de musique classique, apprend que l’on distribue des boules Quiès à l’entrée de certains concerts de rock ou de rap aujourd’hui :

« Dans ma grande naïveté, je croyais qu’il s’agissait d’une blague. Pas du tout. « Chérie, passe-moi les boules Quiès, je vais au concert. » Version arts plastiques : « Chérie, où sont mes lunettes noires ? Je vais à l’expo Soulages. » Ce monde est fou : « Chérie, je sors. Tu n’as pas vu mon entonnoir ? » (…) En tout cas, on ne pourra pas dire qu’on n’aura pas vibré, comme les vitres des riverains ! »

Christian Cottet-Emard a choisi de se tenir « au bord du monde », sur la marge, qu’il juge comme la place qui lui convient le mieux. Celle d’un témoin privilégié. « Je mesure le luxe extraordinaire qui m’est donné de pouvoir dire cela et j’en remercie je ne sais qui car je n’ai malheureusement pas la foi mais je remercie quand même car je n’aime pas l’ingratitude. »

 

Prairie Journal (Carnets 2006-2016), de Christian Cottet-Emard, éditions Orage-Lagune-Express

www.orage-lagune-express.net