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dimanche, 30 mars 2008

André Rochedy, un projet d'exposition

La bibliothèque de Saint-Agrève (Ardèche) m'a récemment contacté pour obtenir un exemplaire des numéros 1 et 17 de la revue Casse, dans lesquels figuraient des poèmes d'André Rochedy. Cette bibliothèque compte en effet réaliser une exposition consacrée à ce poète, natif de la ville, afin d'évoquer sa vie et son oeuvre ; elle veut par ailleurs constituer un fonds rassemblant ses recueils et les revues qui ont parlé de lui.

 

Sur le blog de la revue Casse, j'avais évoqué en 2006 André Rochedy. Je reproduis ce billet.

 

André Rochedy, auteur d’une importante œuvre poétique, est mort le 9 août 2006. Né à Saint-Agrève (Ardèche) en 1942, il demeurait à Lyon où il fut professeur de lettres. Grand connaisseur de la poésie, il m’apporta son aide et ses conseils tout au long de l’existence de la revue Casse, et il figurait au nombre de ceux que je nommais dans l’ours « les amis de l’ombre ». C’est grâce à lui que je pus obtenir pour Casse les textes des meilleurs poètes belges, dont Gaspard Hons, Carino Bucciarelli, André Romus et bien d’autres ; il fit aussi partie des jurys que je formai pour les prix de poésie et de nouvelles organisés par la revue.
Son œuvre est parue chez Cheyne éditeur et à L’Arbre à paroles.
JJN


*

Les griffes des belettes
creusent le sommeil
Des lunes d’hiver
croissent dans nos ciels
Nous ne guérirons pas du froid

Le voyageur dit qu’il va
au plus blanc de la neige

*

Mais quelle bouche a bu
tout le sang de l’étoile
les pommes ensemble
ont vieilli au matin
L’alouette est entrée dans la pierre
nous laisserons nos yeux
aux arbres du jardin
Nous sommes couchés
dans la rosée de soufre
Sur nos mains nos visages
la langue rêche des brebis

*

Un enfant garde
la maison des songes
surgissement de l’orge
dans l’obscur
La mort jappe au fond de l’ombre
quand la lumière élève
les visages
et les oiseaux
tombés en nuit

in Casse n° 1

*

D’un coup d’épaule le vent renverse le jardin et bras levés les ombres s’envolent.
Cris enfoncés dans l’herbe comme étoiles noyées.

Que la blancheur nous soit passage à l’heure où les ténèbres mangent les yeux. Si froids les corps quand ils s’éloignent. Qui nous dira les mots qui montent jusqu’au visage de l’amandier ?

La nuit gagne sur l’enclos de la lampe, une herbe noire recouvre l’étang. On ne sait pas le bruit que font les paroles sous la neige. On peut mourir d’oublier le souffle de la mer.

in Casse n° 17

mercredi, 26 mars 2008

Quatre bêtes

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Vision de Daniel : quatre bêtes

Beatus liebanensis, Commentarius in apocalypsin
Espagne, Castille, premier quart du XIIIe siècle
Paris, BNF, département des Manuscrits, Nouvelle acquisition latine 2290, fol. 18v.

18:56 Publié dans Bestiaire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bestiaire, daniel

lundi, 17 mars 2008

Revues littéraires et blogs littéraires

1657635980.jpgRéseaulire est le site Internet de diffusion et de distribution en bibliothèques de l'édition indépendante. Il regroupe des éditeurs choisis pour la qualité de leurs fonds tant en littérature qu'en sciences humaines, en art ou en jeunesse.

Réseaulire met à la disposition des bibliothécaires :

- des outils efficaces et rapides pour rechercher et commander les livres de leur choix,

- un catalogue d'animations (conférences, expositions...) pour rapprocher auteurs et lecteurs.

 

Dans ce cadre, Réseaulire propose une animation que je conduis sur le thème :

Revues littéraires et blogs littéraires

(à partir de mon guide La Revue mode d’emploi, paru aux éditions L’Oie plate).

 

Le paysage des revues littéraires a été bouleversé par l’apparition des sites et des blogs littéraires, offrant de nouveaux espaces aux lecteurs comme aux auteurs. La revue virtuelle signifie-t-elle la mort de la revue traditionnelle papier, ou peut-elle être pour cette dernière un complément et un moyen de promotion ?

 

Toutes les infos sur cette page.

http://www.reseaulire.com/index.php?ind=ani&p=fic&... 

  

vendredi, 14 mars 2008

L'autoroute (extrait 2)

Il termine la suite de clichés par une vue de trois-quarts des grillages qui délimitent l’aire, puis laisse aller son regard sur le paysage extérieur. Il y a, derrière les clôtures, une sorte d’espace neutre, une zone rapportée de graviers entre lesquels une herbe folle et forte a poussé, avec quelques arbustes acharnés à survivre. Des chardons des ronces des orties. Des nids de vipères qu’on pressent sous la caillasse. C’est une zone tampon, désolée, désertée, comme démilitarisée, un périmètre utile de protection et de transition. On n’y compte que de rares excroissances. Des hangars de tôle et de moellons. Des monuments nains de ciment qui doivent avoir une secrète utilité, pour le service des eaux, l’électricité ou le téléphone. Des bouches d’incendie surnageant rouges sur des lits de fougères, ou parmi un entrelacs de ronces grises. Le paysage résiduel de l’activité morte des hommes.
Car ici, à cette place, sous ses pieds, de part et d’autre de son corps, à l’est et à l’ouest, au sud et au nord, sur une zone bien plus large que l’actuel tracé goudronné, des engins jaunes de terrassement ont dû venir, tout saccager comme dans le paysage de son enfance, faire une trouée dans le décor naturel, retourner le sol, arracher les arbres et la végétation, tuer ou chasser les animaux, percer une voie large, avant de remblayer, aplanir, goudronner, bétonner, clôturer un ruban de terre qui est devenu une frontière artificielle infranchissable. Oui, sûrement, comme dans son enfance, d’énormes camions-bennes, très hauts sur roues, ont dû charrier des tonnes de gravier, défonçant les voies communales, les transformant en chemins creux, boueux. C’est un trafic et une industrie dont la mémoire s’est perdue, maintenant que l’autoroute s’impose dans le paysage, encastrée, enracinée comme si elle était de toute éternité. Et pourtant il a bien dû exister un avant, une histoire de l’autoroute, des étapes de sa conception et de sa construction : des projets, des plans, des enquêtes d’utilité publique, des actes administratifs, des arrêtés, des décrets – les autorités après une consultation formelle imposant leur volonté – puis des préparatifs, des repérages, des bornages avant l’irruption des lourds engins motorisés, avant les tranchées, les destructions, les exactions. Des maisons évacuées, éventrées, démolies au bulldozer, à la boule ou à l’explosif ; des champs dévastés, des vergers anéantis, des chemins supprimés, des souvenirs rasés, des mares, des étangs et des biefs comblés, des buttes rasées, des dénivellations annulées, l’horizontal triomphant ; il y a bien eu une chose à la place d’une autre – naturelle et originale – une substitution de beauté par un acte violent, un acte écrit de violence publique.

 

(extrait d'un roman inédit) 

samedi, 08 mars 2008

Revue de détail n° 11

(Ces chroniques sont parues dans La Presse Littéraire n° 12.)

 

 

HARFANG n° 31

Constance, rigueur et fidélité : telles sont les qualités qui animent cette revue de nouvelles depuis l’origine. Près de 300 nouvelles de 220 auteurs publiées en 15 ans, voilà qui atteste du beau travail de déchiffreur et de passeur que peut revendiquer Harfang, animée par Joël Glaziou et éditée par l’association Nouvelles R. Le numéro 31 publie des nouvelles de Patricia Chauvin-Glonneau, Annick Demouzon, Dany Grard, Ghyslaine Le Dizès, (chaque auteur étant présenté avec force détails bibliographiques) et présente un dossier « Georges-Olivier Châteaureynaud ». Au moment où cet auteur publie son nouveau roman « L’autre rive », somme aboutie de son œuvre, nourrie de toutes les nouvelles précédemment publiées, Harfang lui donne la parole sur son travail de nouvelliste et de romancier et sur sa conception du fantastique. Châteaureynaud définit d’abord les genres : « La nouvelle s’écrit dans l’évitement, dans le refus – non, on n’écrira pas ça, ni ça, ni ça, parce qu’on s’éloignerait du sujet. En revanche le roman accueille a priori tout ce qui se présente à l’esprit de l’auteur – quitte à faire le tri ensuite. Au roman tout fait ventre, à la nouvelle tout fait bosse. », puis précise ce qui l’unit aux membres du groupe informel « Nouvelle Fiction » : « un certain sentiment de la littérature, et au-delà d’une conception de la fiction, la conviction que l’imagination en est le vrai moteur, qu’il n’y a de sage et de sagace en nous que la folle du logis ». Suit une nouvelle inédite de cet auteur, et deux articles critiques sur son dernier roman.

En partenariat avec la ville d’Angers, la revue organise tous les deux ans un concours de nouvelles qui a pour but de récompenser et diffuser un recueil inédit d’un auteur contemporain. L’intérêt de ce concours est que le lauréat voit son recueil publié par les éditions Siloë. Une autre façon pour les responsables de cette revue à l’enseigne de la chouette blanche (« harfang ») de contribuer au mouvement de réhabilitation et de promotion de la nouvelle, un mouvement patient, têtu, entamé depuis au moins deux décennies et qui commence à porter ses fruits, puisqu’il existe désormais des best-sellers de ce genre (Gavalda, Quin, Pavloff…), la bourse Goncourt de la nouvelle, et des espaces qui s’ouvrent pour les nouvellistes dans la grande presse et les magazines.

 

Harfang, 13 bis, avenue Vauban, 49000 Angers. 110 pages, 12 €.

 

POESIE PREMIERE n° 39

Les revues de poésie souffrent en général d’une diffusion restreinte et d’une présentation sommaire. Il faut reconnaître à Poésie/première, revue fondée par Robert Dadillon et pilotée depuis quelques années par Emmanuel Hiriart, le mérite d’avoir su réunir un fond riche et une forme impeccable. Dotée d’un solide comité de rédaction, elle propose trois fois par an des dossiers de fond (Lionel Ray dans ce numéro, qui donne de nombreux poèmes inédits), elle présente nombre de poètes étrangers (un choix de poèmes d’Alan Sillitoe, plus connu comme romancier, avec « Samedi soir, dimanche matin » ou « La solitude du coureur de fond », traduit par Michèle Duclos), des entretiens et des études. Outre les deux auteurs précités, Ernest Pépin, Sali Bashota, Geneviève Roch, Ariane Dreyfus figurent au sommaire. Ce numéro se veut et se titre un « Eloge de l’autre », comme l’indique Emmanuel Hiriart dans son édito : « Poésie/première a décidé d’accompagner plusieurs poètes dans leurs traversées, quêtes ou déracinements, à la rencontre de l’altérité…  C’est en rencontrant l’autre en lui-même, en traversant l’espace intérieur jusqu’à ses plus lointains continents que le poète se découvre étrangement universel. » Cette revue de poésie publie à chaque numéro une nouvelle (Florence Ride), montrant ainsi son ouverture à un autre genre, et offre d’abondantes notes de lecture.

Poésie première, Maison Allegera, Lot. Ibai Ondoa, 64220 Ispoure. 112 pages, 12 €. http://poesiepremiere.free.fr

 

LA PETITE REVUE DE L’INDISCIPLINE n° 165

Une « revuette », comme la nomme avec modestie le secrétaire de rédaction Christian Moncel, mais qui s’impose par sa constance infatigable et par la qualité de sa pensée. Après s’être intéressée à des sujets extra-littéraires (l’anti-publicité, l’art moderne), elle se consacre à ses auteurs de prédilection, Baudelaire, Pessoa et Rimbaud. Les derniers numéros 161 et 165 s’intitulent « Rimbaud : des secrets pour changer la vie ? » et rassemblent des textes de Maurice Hénaud. Sa thèse est originale, surprenante (Rimbaud est pour lui le successeur de Voltaire) mais intéressante et argumentée. « Le renoncement à la crédulité et à la religion, le progrès des sciences et de la philosophie, la marche des peuples, les tyrans mis en fuite, le travail humain, le développement et la mise en œuvre de toutes les facultés humaines, le renoncement au mensonge et à l’erreur, la recherche de l’amour vrai, la poursuite de la vérité, voilà de vrais moyens et de vrais secrets pour, dans une certaine mesure, changer la vie. » De beaux poèmes d’Anne-Lise Blanchard et de Gabriel Le Gal complètent ce numéro.

 

La petite revue de l’indiscipline, B.P. 124, 42190 Charlieu. 40 pages, 3, 40 €. http://indiscipline.hautetfort.com