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mercredi, 27 août 2008

Le Grognard n° 7

grognard7.jpgLe N°7 (septembre 2008) de la revue LE GROGNARD est disponible.

 AU SOMMAIRE :

- Denis Grozdanovitch : L'Ambiguïté et la puissance du rêve chez Anton Pavlovitch
- Mitchell Abidor : American rebels - Jerry Farber : « Les étudiants sont des nègres »
- Guyseika : La vérité est là (poème)
- Champfleury (1821-1889) : De la fausse science et de la prétendue ignorance
- Sébastien Clivillé : Le Philosophe n'a pas dit (poème)
- Aglaé Vadet : Transgression
- Stéphane Beau : Contingences 9
- Denis Vernier : De la philosophie
- Ygor Yanka : La Pornographie ou l'oeil crevé
- C6fran : Le Zazou de Zanzibar
- Thomas Vinau : La Honte
- Stéphane Prat : Le Cabaret de la dernière chance : Tabou à Falésa
- Jean-François Besançon, Stéphane Beau : Du côté des livres

 Quelques pages de ce n°7 sont lisibles en PDF sur le site du Grognard : http://pagesperso-orange.fr/legrognard/ouverture.htm

L'exemplaire est à 7 € (frais de port inclus) La commande est à passer auprès des éditions du Petit Pavé : par mail : editions@petitpave.fr  ou par courrier : Éditions du Petit Pavé - Boîte Postale 17 - 49320 Brissac-Quincé - FRANCE

 Pour connaître les conditions d'abonnement ou d'adhésion à l'Association LE GROGNARD, ou pour proposer un texte il suffit d'envoyer un mail à l'adresse suivante : revue.le.grognard@gmail.com .

vendredi, 22 août 2008

Sommeils


C'est l'histoire d'un écrivain devenu vieux, par le simple effet d'une pente naturelle, et qui ressent depuis peu la fatigue de l'âge. Bien qu'il ne se l'avoue pas, les années font sentir leur poids sur son corps et sur son esprit. Il produit moins. Ses livres raccourcissent. Il n'écrit plus que des histoires brèves, comme un coureur qui ne tiendrait plus la distance. Et pour amorcer chaque jour une page nouvelle, il commence par une formule rituelle, une formule introductive bien rodée : " C'est l'histoire d'un écrivain... ".
Ce début de phrase posé, il continue, ou il essaie, à son rythme, au faible débit de son esprit qui manque de mémoire et d'imagination, qui manque chaque jour davantage d'énergie. Les mots sont lents et rares à venir. Le stylo lui semble lourd et il le dépose, en travers du blanc de la page. Parfois, à sa table de travail, ses yeux se ferment, il a comme des sommeils fugaces. De brèves absences, des coupures infinitésimales de sens, des sortes d'arrêt sur image ou plutôt d'arrêt sur vide. Ou bien il reste les yeux ouverts et fixes mais ne voit rien, il regarde à l'intérieur de lui-même la brume qui se lève et recouvre lentement son paysage mental. Imperceptiblement il décroche. De ses mots, de la feuille, de la pièce, de son corps. Il sombre.
La machine s'arrête : il y a des plages mortes entre les mots. Dans le temps suspendu c'est un état semblable à la mort qui prend place, par son caractère étale, sans fenêtre de sortie, par sa couleur d'un gris régulier, léger. Ce qu'il voit derrière ses paupières s'ouvre à l'infini. Il voyage, sans image, puis revient à lui. Le phénomène est bref, intermittent, mais de plus en plus fréquent.
Ses proches le veillent. Ils ont resserré le cercle, ils se relaient auprès de lui. Ils parlent d'une curieuse maladie qui ronge la mémoire, ils parlent des atteintes de l'âge comme on évoque l'avancée de la mer lors des grandes marées, avec dans la voix ce ton feutré mais convaincu de l'inéluctable, cette soumission à la fatalité. L'écrivain n'est plus le même. Il n'est plus le même en continu. Sa pensée semble prête à se rompre, elle hésite comme sa démarche, il finit la vie en pointillés, il finit son œuvre sur des points de suspension. Mais il ne s'en aperçoit pas. Cette révélation lui serait insupportable. Il est aveugle à ce qui le gagne. Et lorsqu'il voit grandir l'ombre devant ses yeux il croit que c'est le monde entier qui sombre.


VARIANTE

Dans une autre version de cette histoire, qui semblera moins triste au lecteur comme à l'auteur, l'écrivain apparaît moins diminué (il ne s'agit peut-être pas du même individu, ou il est plus jeune). Le phénomène précédemment décrit commence à survenir.
L'écrivain ne se rend compte de rien. Chaque jour il prolonge son œuvre. Il n'a pas dit son dernier mot. Son écriture s'est ralentie mais la qualité de son style ne paraît pas altérée. Certains lecteurs s'interrogent, cependant. Dans ses derniers ouvrages on relève des mots étranges, décalés. Parfois deux phrases ne joignent pas bien. La transition laisse à désirer. On hésite alors : est-ce l'un de ces géniaux raccourcis dont seuls les vieux maîtres sont capables (ou qu'eux seuls osent), et dont la soudaineté et le brio nous déroutent un peu - ou bien faut-il y voir un accroc dans le tissu littéraire, la trace écrite d'une rupture mentale. Les avis divergent. La littérature n'est pas une science exacte. Le style de ce vieil auteur est si subtil et complexe que même un œil averti ne sait plus bien y démêler la maladresse de l'adresse, ni l'accident de l'illumination.

extrait de Portraits d'écrivains (Editinter, 2002)

 

Ce texte est aussi paru dans la revue L'INFINI n° 68 (Gallimard, 1999).

 

dimanche, 27 juillet 2008

Deux publications chez Feedbooks

Deux textes précédemment parus en revues, La nouvelle et La donne, viennent d'être republiés sous forme de petits livres numériques gratuits chez Feedbooks. Ils sont téléchargeables et lisibles en plusieurs formats : PDF, ePub, Mobypocket/Kindle, Sony Reader, iLiad.

 

(Cliquer sur les couvertures pour accéder au téléchargement. Pour la lecture sur ordinateur, choisir le format PDF.)

 

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jeudi, 24 juillet 2008

La possibilité d'une île, le film

Le film « La possibilité d'une île », que Michel Houellebecq a réalisé à partir de son propre roman, sortira en salles le 10 septembre 2008.

Je ne sais ce que donnera l'adaptation de cet immense roman ; pour patienter on peut rendre visite au site du film (vidéos-reportages, interviews pleines de silences et d'hésitations de MH, bande-annonce...) :

http://www.lapossibiliteduneile-lefilm.com/michelhouelleb...

dimanche, 20 juillet 2008

Une lecture intégrale et collective de Proust

Lire l'intégrale de A la recherche du temps perdu de Proust avec un maximum de voix : c'est le projet que Véronique Aubouy a conçu avec "Le Baiser de la Matrice", web-tournage d'une lecture collective et mondiale, ouverte à tous les internautes francophones dotés d'un micro et d'une webcam.
Pour participer et recevoir fin septembre la page de la Recherche qui vous sera attribuée par la "matrice", vous pouvez vous inscrire dès maintenant et pendant tout l'été sur le blog d'inscription :
http://www.lebaiserdelamatrice.fr/

L'enregistrement aura lieu en direct à partir du site, du 27 septembre au 12 octobre.
La lecture sera visible en direct ou en différé sur le site Internet, ainsi qu'au théâtre Paris-Villette pendant le temps du tournage.

 

« Avec "Le Baiser de la Matrice" je propose à plus de 3000 personnes du monde entier de lire devant leur web-caméra une page de A la Recherche du temps perdu de Marcel Proust. Au terme de cette expérience, tous les mots de la Recherche auront été lus en français, par des personnes de tous horizons, en un film de 170 heures environ. Le web-tournage se déroulera en direct sur Internet à partir du 27 Septembre 2008 midi GMT. Il est ouvert à tous. Je vous invite dès aujourd'hui à vous inscrire sur ce blog et à inviter des amis pour construire la cartographie réseau du "Baiser de la Matrice". » (Véronique Aubouy)

 

jeudi, 17 juillet 2008

Dickens House

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Charles Dickens passa un peu plus de deux ans, de 1837 à 1839, dans cette maison située à Londres, 48 Doughty Street, dans le quartier de Bloomsbury. Il y rédigea Oliver Twist et Nicholas Nickleby.

Cette maison, transformée en musée, agréable à visiter, expose des portraits, lettres, manuscrits, éditions originales, ainsi que des objets et mobiliers personnels du romancier.

On peut y voir notamment le beau tableau inachevé (et peut-être plus beau d'être resté inachevé) de Robert William Buss, "Dickens's Dream", qui met en scène l'auteur plongé dans un rêve peuplé de ses créatures romanesques.

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jeudi, 10 juillet 2008

Une signature aux Nouveautés

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Souvenirs : voici bientôt près d'un an que la librairie des Nouveautés, sise au 26 place Bellecour à Lyon, a fermé ses portes. Ce haut lieu de la vie littéraire lyonnaise est très regretté par les lecteurs et les auteurs. Pour rendre hommage à Robert Bouvier et à son équipe, je remets en ligne cette note du 9 avril 2005 relative à la signature de mon roman Le nom, effectuée aux Nouveautés le 30 mars de cette même année.



(Journal du Nom, chronique d’une parution : séquence sixième)

L’un des moyens les plus courants par lequel un auteur peut participer à la promotion de son livre est la séance de signature. Mais tout auteur n’est pas une gloire comme Amélie Nothomb pour laquelle les organisateurs doivent, lorsqu’elle signe dans une grande surface ou un salon du livre, canaliser ses fans derrière des barrières métalliques – et la cérémonie aura généralement une allure plus modeste et conviviale. Un de mes amis écrivain notoirement moins célèbre avait pour promouvoir ses ouvrages programmé une tournée de signatures dans la région, sans négliger de petites librairies, de petites bourgades, pour un résultat assez décevant, me confiait-il. Pour ma part, je ne suis guère amateur de ce type de cérémonie (est-il une épreuve plus décevante, plus déprimante, que d’attendre en vain le chaland, sous le regard désolé et compatissant du libraire, interminables moments où l’on prend conscience de son néant, de son inutilité ?) ; en dehors d’une présence ponctuelle dans certains salons du livre où il m’arrivait de dédicacer un ouvrage à l’occasion, j’avais effectué à Lyon une discrète signature à la librairie Nouvelle, aujourd’hui disparue, pour Noria, en 1988, et une collective à la Condition des Soies, à la Croix-Rousse, pour Immenses, en 1989 – à la demande expresse des éditeurs respectifs. Les deux séances de signatures les mieux préparées à Lyon, les plus satisfaisantes, se sont déroulées toutes deux à la librairie des Nouveautés, animée par Robert Bouvier au 26 de la place Bellecour. La première avait eu lieu en 1984 pour la sortie de Du pays glacé salin, chez Cheyne ; le libraire m’avait consacré toute une vitrine, avec mes recueils en nombre et une grande photo. Je fis une seconde signature aux Nouveautés le 30 janvier 1998, pour la biographie Joséphin Soulary, poète lyonnais, le hasard, qui ne fait pas les choses au hasard mais selon une logique secrète, ayant voulu que le libraire habite la maison même de Soulary.
En refaire une pour Le nom ? Et où ? Je repris contact avec Robert Bouvier, qui à l’annonce de la prochaine parution de mon roman, me proposa spontanément de le signer chez lui. Il restait à choisir une date : ce fut le 30 mars. Pour l’annoncer, j’envoyai quelques cartons d’invitation, des communiqués à la presse locale, à quelques sites internet.
Le jour dit, le libraire (et ses assistantes) avaient bien fait les choses : une vitrine entière était remplie de mes livres, avec de belles affiches réalisées par l’éditeur. Je disposais d’une petite table ornée d’un bouquet de fleurs, et une bouteille de vin blanc fut ouverte pour régaler mes acheteurs. Pendant deux heures se succédèrent mes lecteurs, pour la plupart des gens m'ayant connu dans d'autres circonstances, car Lyon et moi, c'est une longue histoire.

Cette parution est l'occasion de renouer avec de nombreuses personnes qui ont compté dans ma vie, avec lesquelles les liens s'étaient relâchés, atténués, par la simple épreuve du temps, l'usure des jours, un peu comme des chemins qui, à force de ne plus être fréquentés, se recouvrent d'herbe, se referment, et dont on perd par endroits la trace. Membres lointains de ma famille, amis éloignés dans le temps ou l’espace, anciens collègues de travail, poètes et nouvellistes croisés au hasard des publications ou des salons littéraires, bref une liste de connaissances au souvenir desquelles je me rappelle. Ou qui se rappellent à moi...
Ainsi, le 30 mars, lorsque j’arrivai devant la librairie pour prendre les photos ici reproduites, un couple d’anciens collègues de la Direction des affaires sanitaires et sociales avec lesquels je travaillais à la fin des années 70, contemplaient la vitrine en m’attendant. Plus tard, une femme vint me faire signer deux de mes livres « pour son frère Patrick, que j’avais connu à la fac ». Je n’avais en effet jamais revu cet ami d’études depuis trente ans. Etrange que ces personnes non invitées, dont j’avais perdu la trace, viennent à moi à la suite d’une annonce dans un journal ou d’une affiche à la librairie. C’était un peu ma vie en raccourci qui repassait devant mes yeux, le passé venant se superposer au présent comme les deux pans d’un drap se repliant.
Cette manifestation, chaleureuse et sympathique, n’a pas été un franc succès, du moins en ce qui concerne les ventes, situées bien en deçà de celles du « Joséphin Soulary ». S’il fallait en chercher les causes (car on veut toujours tirer des enseignements, lesquels servent d’ailleurs très peu pour l’avenir, les conditions ne se répétant jamais), j’en isolerais deux : la date relativement tardive de cette signature par rapport à la sortie du livre, qui a conduit certains de mes lecteurs lyonnais à ne pas attendre cette date pour acquérir l’ouvrage, soit par correspondance soit en librairie ; la difficulté de plus en plus réelle à obtenir des articles dans la presse locale, que ce soit des critiques de l’ouvrage ou des annonces de la manifestation. Mais, ne serait-ce que pour l’accueil du libraire, la joie des retrouvailles et des échanges, je finis enchanté de ma journée.

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