samedi, 18 juin 2005
Stendhal Erasmus
Les écrivains connaissent les diverses bourses d'écriture (découverte, encouragement, création, allocation sabbatique) qui peuvent être accordées par le Centre national du livre. Les Centres régionaux du livre ont aussi une politique d'aide aux auteurs, consistant en bourses et séjours en résidence.
Ce que l'on sait moins, c'est que le ministère des Affaires Etrangères accorde des "Missions Stendhal", qui sont un peu l'Erasmus des écrivains.
Les "Missions Stendhal" sont attribuées par un Jury renouvelé chaque année, que préside le Directeur général de la Coopération internationale et du Développement au Ministère des Affaires Etrangères, à des auteurs ayant déjà publié et qui ont besoin de séjourner à l'étranger pour réaliser un projet d'écriture.
Le candidat constitue un dossier qui doit comprendre :
- son curriculum vitae ;
- la liste des ouvrages qu'il a déjà publiés ;
- l'exposé du projet en précisant le lieu et la durée souhaitée du séjour.
La décision du Jury est communiquée fin décembre aux lauréats auxquels il sera demandé d'être pendant leur séjour à la disposition des services et établissements culturels dans le pays choisi afin de participer à leurs activités culturelles.
Le Ministère des Affaires Etrangères prend en charge le voyage aller-retour du lauréat et lui accorde une indemnité globale pour la durée du séjour fixée par le Jury.
Renseignements :
Division de l'écrit et des médiathèques
Ministère des Affaires Etrangères
244, boulevard Saint-Germain
75303 PARIS 07 SP.
http://www.france.diplomatie.fr/culture/livre_et_ecrit/st...
08:10 Publié dans Annexes et dépendances | Lien permanent
lundi, 13 juin 2005
Le Salmigondis nouveau est arrivé
18 mois pour sortir une publication trimestrielle, voici une sorte de record à l’envers, un "éloge de la lenteur", pour parler comme certains poètes ; mais plus sérieusement, ce retard est révélateur des difficultés que connaissent les responsables de revues. Pour concurrencer les webzines, il faut faire de gros, de beaux numéros, mariant richesse du contenu et élégance du contenant, donc, engager des fonds. Investir en temps, en argent, en énergie – ressources loin d'être inépuisables.
On n’est pas déçu d’une si longue attente, car la table est bien garnie. Textes et nouvelles, dossiers, interviews nous plongent au cœur d’une création intéressante et souvent peu visible ailleurs. Avec aussi la présence de quelques « poids lourds », dont Abdelkader Djemaï, qui nous régale de son texte « Le tueur », nouvelle d’une écriture économe et rigoureuse, que j’ai eu le plaisir d’entendre lire par son auteur au festival de Saint-Claude.
Salmigondis confirme son statut de découvreur, en nous donnant à lire des auteurs prometteurs : Isabelle Sojfer, ses histoires brèves et cruelles, et Nicolas Puzenat, qui signe une nouvelle magnifique, d’un absurde consommé, « Grandeur des corpuscules ».
Originalité de Salmigondis, le dessin et la BD sont bien représentés. Didier Millotte, qui livre de nombreuses illustrations de ce numéro, répond aux questions de Fuentès : « Par un rejet des produits Disney, entre autres, certains produisent de la boue, sans se rendre compte que ce n’est pas mieux d’un poil. Pour vraiment faire de bons livres pour enfants, il faut avant d’avoir le désir de faire des albums, aimer les enfants. » Ce même jeune dessinateur, qui ne lit « pratiquement plus que la Bible », « le texte le plus fascinant et le plus enthousiasmant de l’humanité », nous sert quelques déclarations réjouissantes et roboratives, à contre-courant, à mille lieues de la vague du « politiquement correct », vague sur laquelle a su surfer Franck Pavloff (également présent dans ce numéro), avec l’invraisemblable succès de Matin brun.
La rubrique Passeurs présente Philippe Gindre, traducteur, rédacteur en chef de la revue Le Codex Atlanticus, responsable des éditions La Clef d’Argent et surtout, passionné de littérature fantastique - et Georges Païta. Ce dernier a fondé la maison d’édition qui répond au beau nom de La Tour d’Oysel. Nouvelliste lui-même, il publie des recueils de nouvelles de belle facture et, n’ayant pas trouvé un accueil très favorable chez les libraires, a privilégié un mode original de diffusion : « Les recueils ont dès le début rencontré le meilleur accueil auprès des documentalistes et des professeurs de lettres des lycées et collèges, pourtant réputé lectorat difficile. A la suite d’une série d’articles parus dans la revue INTERCDI, l’officiel des documentalistes, conseillant la lecture de mes textes aux élèves du secondaire, de nombreuses commandes émanant d’établissements scolaires se sont bousculées sur mon fax… Interventions et rencontres avec les élèves ont suivi à cadence soutenue, générant de nouvelles commandes. Au point que j’ai dû entreprendre par trois fois la réédition de Piégés (4 000 exemplaires vendus à ce jour) et que le premier tirage de De plein fouet (3 000 exemplaires) est quasiment épuisé. »
Calou, responsable du site internet « Calou, l’ivre de lecture », dans son article en forme de confession « Lire est un métier difficile », fait part de son expérience de lectrice passionnée. Elle se heurte à deux types de fâcheux : les critiques professionnels qui méprisent les critiques amateurs (« Personne dans le monde littéraire actuel ne leur accorde un crédit authentique, leur autorise une ouverture, hormis celle parcimonieusement offerte à une poignée de chanceux : les jurés de prix littéraires populaires, libres de toute influence ») et les auteurs à l’ego démesuré, dont on ne dira jamais assez de bien dans les articles qui leur sont consacrés : « Je ne suis plus étonnée ni surprise aujourd’hui, simplement lasse devant les lettres prétentieuses et pédantes que je reçois. Ne perdons pas de vue que nous sommes tous absurdement humains, ce qui sous-entend lumières et paradoxes, tendresse et surprises – les bonnes comme les mauvaises -, et donc les « je sais écrire mais vous ne savez pas me lire ». Heureusement, Calou continue malgré tout, une critique de coup de cœur, indépendante et éclairée.
Un ensemble riche et cohérent, placé sous le signe de l’ouverture, de la curiosité, de la rencontre, complété par de nombreuses chroniques sur les livres et les revues. Espérons que Salmigondis ne cherchera pas à battre une nouvelle fois son record de non-parution !
Salmigondis n° 21, 10 €. Abonnement 4 n°s 35 €.
452 route d’Attignat, 01310 Polliat. Site www.salmigondis.com
12:50 Publié dans Revues littéraires | Lien permanent
vendredi, 10 juin 2005
Joséphin Soulary (1815 - 1891)
Joséphin Soulary a été l’un des poètes reconnus et célèbres du 19e siècle. Baudelaire et Sainte-Beuve l’appréciaient et lui ont consacré des études élogieuses. Né à Lyon, Croix-Roussien et contemporain de Pierre Dupont, il est aujourd’hui injustement oublié.
Après des années de jeunesse difficiles, Joséphin Soulary devient en 1840 chef de cabinet du préfet Jaÿr, puis chef de division à la préfecture du Rhône. Il termine sa carrière comme conservateur de la Bibliothèque municipale. N’ayant jamais cessé d’écrire, il connaît sa consécration littéraire en 1859 avec les Sonnets Humouristiques, parus chez Perrin. Auteur d’une œuvre importante, Soulary s’est surtout illustré dans l’art du sonnet, dans lequel il était passé maître. On l’a comparé en son temps à Théophile Gautier et Leconte de Lisle. Au-delà du classicisme impeccable de la forme, de nombreux poèmes de cet auteur séduisent encore le lecteur contemporain par leur originalité, leur force d’émotion et un humour, parfois mélancolique et désenchanté, qui les rendent très actuels.
Ses Oeuvres poétiques ont été rassemblées en 3 volumes chez Lemerre (1887).
*
SONNET DE DECEMBRE
L’hiver est là. L’oiseau meurt de faim; l’homme gèle.
Passe pour l’homme encor ; mais l’oiseau, c’est pitié !
Dans un bouquin rongé des rats plus qu’à moitié
j’ai lu qu’il paie aussi la faute originelle.
La bise a mangé l’air, durci le sol, lié
Les ruisseaux. - Temps propice aux heureux ! La flanelle
Les couvre ; au coin du feu le festin les appelle.
Mais les autres ?.. Sans doute ils auront mal prié !
Le soleil disparaît sous la brume glacée ;
C’est l’acteur des beaux jours qui, la toile baissée,
Prépare sa rentrée au prochain renouveau ;
et, tandis qu’on grelotte, il vient, par intervalle,
regarder plaisamment, l’oeil au trou du rideau,
La grimace que fait son public dans la salle.
in La chasse aux mouches d’or
*
UNE GRANDE DOULEUR
Comme il vient de porter sa pauvre femme en terre,
Et qu’on est d’humeur noire un jour d’enterrement,
Il entre au cabaret ; car la tristesse altère,
Et les morts sont bien morts ! - c’est là son sentiment.
Il se prouve en buvant que la vie est sévère ;
Et, vu que tout bonheur ne dure qu’un moment,
Il regarde finir mélancoliquement
Le tabac dans sa pipe et le vin dans son verre.
Deux voisins ses amis sont là-bas chuchotant
Qu’il ne survivra pas à la défunte, en tant
Qu’elle était au travail aussi brave que quatre.
Et lui songe, les yeux d’une larme rougis,
Qu’il va rentrer ce soir, ivre-mort, au logis,
Bien chagrin - de n’y plus trouver personne à battre.
in Les diables bleus
*
SUB SOLE QUID NOVI ?
Sous mes yeux vainement tout se métamorphose,
L’enfance en la vieillesse, et le jour en la nuit ;
Dans ce travail muet qui crée et qui détruit,
C’est toujours même loi, même effet, même cause.
Aujourd’hui vaut hier. Comme un collier morose
L’Ennui soude le jour qui passe au jour qui suit ;
Et l’immobile Dieu gouverne ce circuit,
Où l’acteur machinal quitte et prend même pose.
Sur le rayon de l’heure et dans le bruit des jours,
La vie a beau tourner, rien ne change son cours ;
Le pendule uniforme au front du Temps oscille.
N’est-il donc nulle part un monde où l’inconnu
Déconcerte l’attente, où, sur le cadran nu,
La Fantaisie en fleur fasse la folle aiguille ?
in Papillons noirs
Voir aussi :
Joséphin Soulary (2) : introduction de l'ouvrage
Joséphin Soulary (3) : une oeuvre à redécouvrir
Joséphin Soulary (4) : petite anthologie
06:10 Publié dans Anthologie de poètes lyonnais | Lien permanent
jeudi, 09 juin 2005
Où l'on parle encore des blogs littéraires
Sur Wanadoo Maroc, un billet intitulé
Voyage dans la blogosphère littéraire,
où l'on apprend que Jean-Jacques Nuel (comme Christian Cottet-Emard) est un écrivain anonyme.
Voilà sans doute pourquoi j'ai publié un roman qui s'intitule Le nom !
18:35 Publié dans Annexes et dépendances | Lien permanent
vendredi, 03 juin 2005
Un article sur Arte-tv
Sur le site de la chaîne ARTE, parmi la sélection de livres de la semaine, un article sur Le nom :
http://www.arte-tv.com/fr/886816.html
20:25 Publié dans Annexes et dépendances | Lien permanent
mardi, 31 mai 2005
Houellebecq hors-série
Hors-Série HOUELLEBECQ
+
DVD EXCLUSIF
En avant-première de la parution de son nouveau roman, La Possibilité d’une île le 1er septembre, Les Inrockuptibles publient un hors-série exceptionnel sur Michel Houellebecq accompagné d’un DVD exclusif avec 1 h 40 d’entretien réalisé en avril 2005 ainsi que son film érotique : La Rivière.
Au programme de ce hors-série de 100 pages :
> La place de Houellebecq dans la littérature en France en 2005
> L’ « abécédaire Houellebecq » ou le lexique de son univers.
> Houellebecq vu par ses différents éditeurs
> Houllebecq vu de l’étranger : témoignage de Julian Barnes
> Houellebecq et le cinéma
> L’intégrale des interviews parues dans Les Inrockuptibles
> Les chroniques de Houellebecq écrites pour Les Inrockuptibles à la fin des années 90.
> Reportage sur l’adaptation de Plateforme à l’ICA de Londres, fin 2004
> Bibliographie complète et portfolio inédit réalisé par Houellebecq lui-même.
+ DVD EXCLUSIF :
> Interview vidéo exclusive d’1 H 40 réalisée en avril 2005 sur ses terres en Espagne : retour sur l’ensemble de sa vie et de son œuvre à travers 10 chapitres correspondant aux 10 livres-clés de sa carrière.
> Court-métrage érotique de 16 minutes, réalisé par Michel Houellebecq en 2002 : La Rivière.
En kiosque (12 €)
En partenariat avec I Télé et France Culture
*
Un bel objet, assurément, de quoi ravir les fans de Houellebecq. Belle mise en page, superbes photos, iconographie, interviews intéressantes (notamment celles de ses éditeurs Bulteau, Nadeau, Sorin), repères chronologiques, quelques articles de fond. Un DVD propose un long entretien avec l’auteur, réalisé en Espagne, qui revient sur chacun des livres publiés.
Et pourtant, la déception s’installe et perdure devant un certain manque de consistance, la plupart des articles reproduits ont déjà été publiés dans Les Inrocks, critiques de livres ou contributions de MH au magazine.
De l'entretien de 100 minutes, entrecoupé de silence, d'hésitations, (dans lequel Houellebecq reste conforme à l'image qu'il a créée ou qu'il a laissé créer, habillé en Deschien, fumant cigarette sur cigarette sur cigare placés entre l'index et l'annulaire, air gêné, "médiatique en étant anti-médiatique", comme le souligne Julian Barnes), on apprend peu de choses : sa foi en la science, qui fait avancer la Vérité ; sa certitude de la fin inéluctable des religions, qu'il considère comme "triste", l'homme ayant troqué son espoir en une vie éternelle pour un désespoir du néant ; son refus d'être taxé de réactionnaire, car il croit en l'irréversibilité des choses et ne se pose pas la question de savoir si c'était mieux avant, tandis que le réactionnaire veut un retour vers un âge d'or.
La question reste entière : comment et surtout pourquoi Michel Houellebecq est-il devenu l'auteur français le plus reconnu, le plus traduit dans le monde ? Que l'auteur lui-même n'ait pas toutes les clés, rien de plus normal, la création devant se faire largement en aveugle, au revers d'une certaine opacité de la pensée - mais il manque encore (à ma faible connaissance) et malgré un texte intéressant de ce hors-série signé Marc Weitzmann, des études et des critiques puissantes de ce phénomène unique, que l'on ne peut réduire - comme le font certains lecteurs rapides - à la seule dimension sociologique. Que Houellebecq soit le meilleur observateur de l'homme moyen de son temps ne suffit pas à expliquer la dimension de son œuvre et sa résonance auprès de ses lecteurs. J. G. Ballard nous dit à quel point il a été impressionné par Les Particules élémentaires : « Je pense que c’est le principal, chez Houellebecq, ce qui explique qu’il est un vrai original : vous vous souvenez de ce qu’il écrit. Il mord profondément, et il ne lâche pas prise. La plupart des écrivains, malheureusement, sont complètement oubliables. Vous oubliez ce qu’ils racontent au moment même où vous les lisez. Houellebecq apporte des nouvelles, alors vous vous asseyez, et vous faites attention. »
L’un des plus grands cinéastes français, Maurice Pialat, avait d’ailleurs mesuré l’importance de cette œuvre. Ayant d’abord songé à adapter Extension du domaine de la lutte (les droits étaient malheureusement déjà vendus), il avait ensuite prévu d’adapter Les Particules élémentaires, mais la maladie l’empêcha de réaliser ce projet.
20:55 Publié dans Lectures | Lien permanent
samedi, 28 mai 2005
L'album de Monsieur K.
Invité à s'épancher sur le divan, Monsieur K. refusa de se séparer de son Journal et demeura bouche close.
Gérard Bertrand, artiste inventeur d'images, nous propose sur son site une série de 16 photographies, "L'Album de Monsieur K."
"Et si l'ami Max Brod ne s'était pas contenté de sauver des flammes les petits cahiers bleus. S'il avait, malgré l'interdiction, conservé aussi un mince album de seize photographies ? Et ce serait cet album qui serait présenté ici. Un album de photographies improbables où Franz Kafka (Monsieur K.) apparaîtrait dans des lieux et approcherait des personnages qu'il aurait pu (ou qu'il n'aurait jamais dû) rencontrer. Une vie rêvée en sorte. Un hommage, de toute façon."
Un voyage dans le temps et dans l'imagination, des scènes irréelles mais d'une secrète cohérence. Les éclairages, les compositions, les atmosphères et le ton sépia ont été choisis pour restituer au mieux le climat de cauchemar tranquille et d'horreur ouatée qui baigne les écrits de Kafka. Le regard admiratif que porte Gérard Bertrand sur le génial écrivain qui hanta la Ruelle d'Or de Prague n'exclut pas la distance, une ironie respectueuse que n'eût pas reniée l'auteur du Procès.
20:55 Publié dans Annexes et dépendances | Lien permanent