mercredi, 11 janvier 2006
Rencontre avec Sabine Wespieser
Sur le site de Calou, l'ivre de lecture, une passionnante rencontre avec l'éditrice Sabine Wespieser. On y apprend tout sur le métier d'éditeur, depuis les choix littéraires jusqu'aux contraintes économiques. Pour les auteurs, cette interview est une mine d'informations et d'enseignements, une occasion de lucidité.
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lundi, 02 janvier 2006
De la dangerosité de la fonction de critique
(En hommage à l’ami Christian Cottet-Emard, cette anecdote qui pourrait alimenter son feuilleton « Tu écris toujours ? »)
Si l'aventure est paraît-il au coin de la rue, le danger peut naître de l’activité en apparence la plus casanière et la plus minuscule qui soit : la critique littéraire, et en l’occurrence, revuistique.
Ayant rédigé pendant plusieurs années des articles critiques, essentiellement sur les revues littéraires dans le magazine Ecrire & Editer, je pratiquais une sorte de « critique objective » ; je rendais compte d’abord des revues par leur extérieur et leurs caractéristiques formelles : format, nombre de pages, prix, périodicité, nombre et qualité des illustrations, couleurs d’impression, qualité de la typographie, qualité du papier et de la couverture, répartition et importance des composantes du contenu, et j’en tirais des conclusions. Je commençais toujours mes recensions avec un double-décimètre à la main, notant soigneusement la largeur, la hauteur, l’épaisseur du dos carré. Puis je passais au fond, avec une franchise et parfois une violence verbale qui m’ont valu bien des déboires.
Dans Ecrire & Editer, je n’ai pas manqué d’être sévère dans mes jugements et de blesser les autres. C’est la règle du jeu, à laquelle en tant que créateur je n’échappe pas : mes œuvres littéraires publiées n’ont pas recueilli que des échos favorables, et ce présent blog m’a valu bien des reproches, tant sur son projet que sur les idées exprimées. Il faut savoir accepter la critique négative, même si elle nous apparaît injuste, même si elle nous blesse, car elle fait partie de la vie, comme les divergences d’opinions et de goûts. Faire l’unanimité sur son œuvre est un rêve de malade mental ou d’orgueil sans bornes. Il me revient en mémoire à ce propos un incident particulièrement notable et révélateur – une agression - qui se produisit lors d’un Salon de la Revue, à l’Espace des Blancs-Manteaux, à Paris. Je me trouvais sur le stand de Salmigondis, discutant avec les responsables du magazine, qui jouxtait la table de la revue Trouduc (je change le nom de la revue – mais pas son esprit ! – pour limiter les polémiques.) Soudain, le responsable de cette dernière revue se tourna vers moi, blême et tremblant de rage rentrée :
- Vous êtes Jean-Jacques Nuel ?
Je ne pus qu’acquiescer, la réponse étant évidente, et m’attendant à tout, même au pire. Et le pire arriva.
- Vous avez écrit dans Ecrire & Editer un article sur notre revue, qui est la seule critique négative que nous ayons eue !
- Ah bon. Et alors ?
- Vous avez écrit que le lecteur se trouve devant notre revue « comme une poule devant un couteau » ! Je ne connaissais pas le sens de cette expression, je l’ai vérifiée, c’est un jugement très négatif, le seul de notre dossier de presse !
Etonné d’abord qu’un individu apparemment si content de lui-même ignore le sens d’une expression courante, je me remémorais cet article, en me disant que cette expression convenait bien à ce j’avais éprouvé et continuais de penser. J’entrepris de me justifier, de lui dire que pour moi, un objet littéraire (roman, recueil ou revue) doit être porteur de sens, et que tout en reconnaissant la grande qualité de réalisation de Trouduc, je ne comprenais pas le sens de leur projet, dont l’originalité ne suffisait pas à me satisfaire. L’échange en resta là, le prolonger eût été dialogue de sourds, et nous restâmes, lui avec sa colère d’avoir eu une critique moins positive au milieu d’un concert impressionnant de louanges, moi avec ma perplexité devant la susceptibilité de certains membres du milieu littéraire.
Intrigué par cet incident, j’ai relu depuis l’article incriminé, et n’y ai pas trouvé de quoi, comme on dit, fouetter un chat.
12:00 Publié dans Revues littéraires | Lien permanent | Commentaires (4)
vendredi, 30 décembre 2005
TsimTsoûm n° 1
L'évènement revuistique de l'année (et le site)
Après avoir attendu sa parution plusieurs mois, et être allé trois fois à l’étonnante librairie-galerie Le Bal des Ardents (17 rue Neuve, 69001 Lyon), j’ai enfin pu découvrir le numéro inaugural de la revue TsimTsoûm. Ce nouveau magazine semestriel succède à feu « Cancer ! », et est dirigé comme le précédent par Laurent James et Bruno Deniel-Laurent (le troisième comparse, Johann Cariou, ayant fait défection au passage). Au sommaire, un entretien passionnant de Laurent James avec Soheib Bencheikh sur l’Islam, une descente de Ubu Sollers par Jourde, de beaux textes de Sarah Vajda, Dominique Zardi, des pages anciennes mais actuelles de Bloy et Cravan, un texte roboratif de Costes sur Genet, des récits et nouvelles dont un « Guevara dans la brume » de Laurent Schang… Anti-gauchiste, anti-droite et anticipateur, c’est la bonne surprise de l’hiver.
TsimTsoûm n° 1, 49 rue Saint-Aubin, 49100 Angers. 9, 70 €.
Pour une critique plus complète, se reporter à ma chronique "Revue de détail" n° 2 :
http://nuel.hautetfort.com/archive/2006/04/13/revue-de-de...
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dimanche, 18 décembre 2005
Houellebecq, par Demonpion
Une enquête biaisée
(article paru dans Le Journal de la Culture n° 17)
Dans sa biographie « non autorisée », Denis Demonpion, journaliste au Point, mène l’enquête sur Michel Houellebecq, ce phénomène des médias ; il éprouve une réelle admiration pour l’œuvre, ce qui ne l’empêche pas de garder une distance critique envers le « personnage » et d’estimer que, sous ses airs gauches et indolents, l’homme est un calculateur très habile, « un orfèvre en manipulation, un maître en dissimulation ». La dernière phrase du livre résume sa thèse : « De manière pesée, appliquée, méthodique, Michel Houellebecq construit sa vie comme un roman, et il en use magistralement. »
Mais les deux preuves apportées par le biographe, ces petits arrangements avec l’état civil, à savoir l’utilisation d’un pseudonyme et le rajeunissement de deux ans, ne sont pas très convaincantes.
D’abord, le pseudonyme. Nombre d’auteurs ont recours à un pseudonyme, sans qu’on en tire de conclusion aussi radicale. L’emprunt de « Houellebecq » peut être vu comme un hommage rendu à sa grand-mère paternelle Henriette, qui l’a élevé et a été la seule à lui donner de l’amour, ainsi qu’une façon de rejeter une existence malheureuse vécue sous le nom de Thomas.
Quant à la falsification supposée de l’année de naissance, jeu d’écriture que Houellebecq aurait selon Demonpion transposé avec malignité dans la différence d’âge des deux héros des Particules élémentaires (l’aîné Bruno né en 1956, Michel le cadet en 1958), Houellebecq s’en explique dans le journal « Mourir » qu’il a mis en ligne sur internet (www.michelhouellebecq.com) :
« Je suis né en 1956 ou en 1958, je ne sais pas. Plus probablement en 1958. Ma mère m’a toujours raconté qu’elle avait trafiqué l’acte de naissance pour me permettre de rentrer à l’école à quatre ans au lieu de six – je suppose qu’il n’y avait pas de maternelle à l’époque. Elle s’était persuadée que j’étais un surdoué – parce qu’à l’âge de trois ans, paraît-il, j’avais appris à lire tout seul, avec des cubes, et qu’un soir en rentrant elle m’avait retrouvé, à sa grande surprise, lisant tranquillement le journal.
Qu’elle ait eu le pouvoir de le faire, ça ne fait aucun doute : les actes d’état civil étaient manuscrits et approximatifs, et elle faisait vraiment partie des notables à l’époque à La Réunion, elle y avait des relations puissantes. »
Cette biographie bien enlevée, d’une écriture alerte, contient, à défaut de révélations fracassantes, bien des éléments intéressants sur le parcours de Houellebecq : ses études d’ingénieur agronome, titre qu’il partage avec Alain Robbe-Grillet ; son passage à l’école Louis-Lumière où il a appris les techniques du cinéma (ce qui laisse présager qu’il n’abordera pas en naïf absolu la réalisation de son prochain film) ; sa relation privilégiée avec Michel Bulteau, son véritable découvreur ; le rôle moteur de Raphaël Sorin ; ses quinze années d’informaticien (qui l’inspireront tant pour son premier roman), dont les six dernières à l’Assemblée nationale, boulot de subsistance qu’il vit dans la désespérance mais dont il s’acquitte avec conscience ; ses deux mariages ; son impossibilité de placer auprès des éditeurs le manuscrit d’ Extension du domaine de la lutte, cette œuvre aujourd’hui culte, et le combat de sa femme Marie-Pierre et de Dominique Noguez pour arracher à Maurice Nadeau la publication du manuscrit ; les démêlés avec les membres doctrinaires de la Revue Perpendiculaire, vrais commissaires politiques auxquels Demonpion accorde trop d’importance ; sa brève expérience de la chanson et de la scène (il a fait l’Olympia !), que Didier Saltron présente ainsi : « Un grand moment de catastrophe musicale. Avec sa dégaine de dépanneur en informatique venu de Villepinte, il swinguait comme un fer à repasser. » ; la détresse du couple Houellebecq en Irlande, harcelés et insultés au téléphone après les déclarations de l’auteur sur l’Islam, l’aide et le refuge apportés par Michel Déon.
Côté sensationnel, Demonpion a retrouvé et interrogé les parents de l’écrivain. Celui-ci s’est brouillé violemment avec ses géniteurs, qu’il accuse, avec raison, de l’avoir abandonné. « Je les ai très peu vus pendant mon enfance. En un sens, c’était des précurseurs du vaste mouvement de dissolution familiale qui allait suivre. » Demonpion leur fait la part trop belle et se fie trop à leur parole, notamment celle de la mère, qui manipule l’interviewer. Après avoir lu les œuvres (dans Les particules élémentaires, elle apparaît même sous son véritable nom de jeune fille), on l’imaginait monstrueuse ; après avoir lu ses déclarations recueillies dans ce livre, l’opinion risque d’être encore plus sévère. Militante permanente qui s’est occupé des déshérités de la terre entière mais ne s’est jamais occupé des siens, elle va jusqu’à livrer ce jugement incroyable sur son fils : « Un surdoué mental, un sous-doué affectif » ! (A qui la faute ? a-t-on envie de lui rétorquer.)
Ce livre est aussi la saga d’une réussite exceptionnelle, celle d’un homme parti de rien, sans atouts, parvenu avec méthode et pugnacité au sommet de la littérature internationale. On savoure rétrospectivement cet extrait d’une lettre du 15 août 1990, où il parle de ses premières publications de poésie : « Si ça continue, je vais en arriver au point (théoriquement impossible) où la littérature constituera, non seulement ma principale source d’intérêts, mais également ma principale source de revenus. Il vaudrait mieux pas, car ça signifierait des revenus vraiment ridicules. »
Si le livre s’intitule Houellebecq non autorisé, c’est parce que le « sujet d’étude » n’a pas voulu collaborer à cette biographie ni répondre aux questions de Demonpion. Les approches sont exposées avec clarté, et Houellebecq reprend les mêmes choses dans son Journal : « C’est alors qu’une idée m’est venue, que je continue à trouver éblouissante. Je laisserais Demorpion (sic) écrire sa biographie, enquêter, etc., puis il me remettrait son manuscrit terminé. Je le lirais, puis j’y rajouterais des notes de bas de page. Je n’interviendrais en aucune manière sur le texte de l’auteur, mais lui-même s’engageait à un respect total pour mes notes. On obtiendrait au final un objet curieux, ne ressemblant à mon avis à rien de ce qui a pu être fait dans ce domaine. ». Il est certain que l’on a raté là l’occasion d’un grand livre, original et contradictoire.
Traquant, avec le travers commun des biographes, des similitudes entre la vie du romancier et ses créatures romanesques, en tirant des conclusions parfois hâtives, écrivant quelques naïvetés, traînant un indécrottable fond de politiquement correct, Demonpion ne convainc pas mais livre néanmoins un ouvrage plutôt attachant et un portrait plus nuancé qu’on n’aurait pu le craindre de ce grand provocateur - qui répond simplement après la tempête provoquée par ses œuvres : « Si on ne peut plus rien écrire, il n’y a plus qu’à aller se coucher et faire des dominos. »
Houellebecq non autorisé, enquête sur un phénomène, par Denis Demonpion, Maren Sell éditeurs, 20 euros.
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vendredi, 16 décembre 2005
Combat du dragon et de l'archange Michel
18:25 Publié dans Bestiaire | Lien permanent | Commentaires (1)
dimanche, 11 décembre 2005
L'internet littéraire, vu par Le Point
Un article intéressant, « La grande parlerie », signé Jacques-Piere Amette, dans Le Point :
http://www.lepoint.fr/litterature/document.html?did=171767
La vie littéraire est-elle vivifiée par l’Internet ? A l’évidence, oui, pour l’auteur de l’article qui fait un tour d’horizon, des sites officiels d’éditeurs aux revues en ligne, forums et blogs. Malheureusement, suivant l’adage « On ne prête qu’aux riches », il ne parle que des sites et blogs d’écrivains très connus (Werber, Vargas, Bon, Assouline, Houellebecq… et l’inévitable Mu Zimei – qui aurait atteint 30 millions de connexions/jour !) Pour un panorama, cela manque vraiment de diversité et de curiosité !
11:10 Publié dans Annexes et dépendances | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 29 novembre 2005
La presse Littéraire
La presse Littéraire en kiosques le 15 décembre 2005
Le 15 décembre 2005, en accord avec le groupe Entreprendre – Robert Lafont, Le journal de la Culture, bimestriel, devient La presse Littéraire, revue désormais mensuelle, distribuée à 25 000 exemplaires en kiosques, 180 x 280 mm, dos carré, offrant 100 pages denses (l'équivalent de 300 feuillets) consacrées à la Littérature et à l'Écrit. Un cahier Journal de la Culture, lié à l’actualité du cinéma, du théâtre, de la musique et des arts, vient clore la revue.
Ce qui représente encore plus d'ouvrages critiqués, commentés, mis en perspective, plus d'entretiens, d'études et toujours ce va-et-vient entre les "anciens" et les "modernes".
La "philosophie" et le positionnement de la revue restent les mêmes :
Ni guide ni vade-mecum du prêt à penser, éclectique, passionné, ouvert à toutes les tendances, nécessairement subjectif dans ses choix et ses approches éditoriales, La presse Littéraire a pour seule ambition de donner à lire, à voir et à entendre en allant à la découverte - ou à la redécouverte -, sans a priori, chapelles, ni parti pris, de la littérature dans toutes ses composantes : être un lieu de passages et de convergences, à l'intersection de l'émotion, de la passion, des talents et du plaisir. Un révélateur de sensations.
Le blog de La presse Littéraire est d'ores et déjà ouvert.
Information communiquée par Joseph Vebret, responsable du Journal de la Culture.
19:05 Publié dans Revues littéraires | Lien permanent | Commentaires (0)