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mardi, 08 mai 2007

Artaud & Bossuet, une lecture croisée

 

Mardi 15 mai, à 20 heures


Les Mardis d'Isabelle accueillent :

 

A & B

A comme Artaud

B comme Bossuet

une lecture de textes d'Artaud et Bossuet

par Jean-Jacques Nuel

 

35 rue Sainte-Hélène 69002 Lyon

Participation : 1 euro et une boisson ou un grignotage

 

samedi, 05 mai 2007

Le site Points-virgules

Découverte au hasard du web de ce lieu de ressources littéraires tenu par Vincent Garand, Points-Virgules, qui propose 337 citations, dont 5 saillies de votre serviteur.

http://www.points-virgules.com/citations.php

 

mardi, 01 mai 2007

Rencontre avec La Nouvelle Tour de Feu

medium_ntdf44.jpgLa Tour de Feu a été une revue mythique, qui a compté dans l’histoire de la littérature. Elle survit et se renouvelle sous la direction de Michel Héroult, qui a créé La Nouvelle Tour de Feu. Une rencontre pour découvrir quelle est la part de la tradition, et celle de l’innovation.
(Cet entretien publié voici quelques années dans Ecrire & Editer a été actualisé par Michel Héroult en avril 2007.)

Jean-Jacques Nuel : Comment est née la NTDF ? Quelle continuité entretient-elle avec la mythique Tour de Feu ?
Michel Héroult : En 1981, Pierre Boujut annonce la fin de la Tour de Feu. Je propose, avec Liliana Klein, de continuer avec le titre « La Nouvelle Tour de Feu ». Je figure au comité de rédaction de l’ancienne Tour et j’ai fréquenté les congrès de Jarnac depuis 1961. Pierre Boujut donne son accord. Dans les premières années, la Nouvelle Tour de Feu publie surtout les collaborateurs de l’ancienne. Pierre Boujut meurt en 1992. La NTDF prend alors réellement son autonomie et accueille de nouveaux collaborateurs. Le ton change et une large ouverture vers la création contemporaine se fait. Il n’y a pas eu rupture avec la Tour de Feu de Pierre Boujut, mais lente évolution. A son tour, la NTDF entre dans le mythe.

JJN : La part des chroniques est importante. Une revue peut-elle se passer d’une partie informative ?
MH : Ce qui fait la spécificité d’une revue, par rapport à une anthologie par exemple, c’est justement d’informer. Les poètes se plaignent d’être mis à l’écart, mais les revues offrent une large compensation. Les « sacs à poèmes » sont illisibles. Il faut alterner les genres : critiques, courtes nouvelles, études, poèmes. De ce point de vue, la NTDF, je crois, a donné le bon exemple en diversifiant au maximum les signatures.

JJN : Pourquoi garder la même couverture à chaque numéro ?
MH : Il s’agit d’imposer une spécificité. Il suffit de la voir à deux mètres et la revue est tout de suite reconnue. Du point de vue technique, c’est plus pratique, mais je compense en variant les couleurs. Les illustrations à l’intérieur de la revue donnent de l’espace aux novateurs. L’acquisition d’un photocopieur en couleur a apporté une véritable révolution.

JJN : Comment diffusez-vous la revue ?
MH : Je suis parti du fichier de la Tour de Feu dont Pierre Boujut m’a fait cadeau en 1982. Des bibliothèques abonnées à l’époque le sont toujours. La Tour de Feu constituait une famille d’esprits et la plupart des abonnements se sont reportés sur la NTDF. Mais entre les « anciens » de la Tour et les « nouveaux », il y avait la différence d’une génération. Nombre des abonnés du début sont morts. Le fichier s’est renouvelé à l’image de la vie. L’essentiel des apports se fait par contacts directs et bouche à oreille. J’effectue un important service de presse.

JJN : La NTDF apparaît de l’extérieur comme un lieu d’amitié et de fidélité. Cette impression est-elle juste ?
MH : C’était vrai il y a vingt ans ; on se retrouvait une fois par mois, dans un restaurant parisien.
Bien avant, vers les années 60, il existait des rencontres hebdomadaires dans le Quartier Latin et des rassemblements à Jarnac vers le 14 juillet (Jean Follain voulait qu’on défile derrière la fanfare, mais ce n’était pas du goût de Pierre Boujut.) Des curieux passaient. Des drames se nouaient, se dénouaient. En fait, il y avait alors deux pôles de pouvoir : Jarnac où régnait Pierre Boujut et Paris où la fronde grondait souvent.
Depuis plus de vingt ans, la NTDF est toujours présente au Marché de la Poésie de la place Saint-Sulpice à Paris. Plusieurs rencontres ont eu lieu aussi à Guyancourt, où Roland Nadaus était maire. Il existe là-bas, ceinturant un plan d’eau, le chemin de la Tour de Feu et un édifice public porte le nom de Moreau du Mans. Ce dernier n’a jamais figuré dans le comité de rédaction de Pierre Boujut, mais la NTDF, depuis, a largement réparé cet oubli.
Un lieu, peut-être, reste à trouver. Voici la question : le train de la vie passe-t-il deux fois ? On peut penser que oui, puisque la NTDF compte maintenant un quart de siècle d’existence.

JJN : Répondez-vous aux envois de textes ? Quels conseils donneriez-vous aux jeunes auteurs désireux de publier ?
MH : Les courriers que l’on reçoit ne sont pas toujours « raisonnables ». Les Editions du Soleil natal ajoutent à la confusion. Quand on reçoit un pavé, est-ce pour la revue ? Pour un livre ? Parfois je téléphone et j’explique notre position : publication à dose modérée de poèmes à compte d’éditeur dans la revue ; refus de publication de poèmes à compte d’auteur. Dans la mesure où je fabrique moi-même les livres, la capacité de production est forcément réduite, d’autant plus que Soleil natal se retrouve aussi en position d’imprimeur ( revue A l’Index, que dirige Jean-Claude Tardif, et naguère recueil annuel d’un auteur décédé, et un bulletin municipal). Soleil natal publie à compte d’éditeur deux à quatre livres par an (Histoire en Essonne, ésotérisme et spiritualité). Les jeunes auteurs qui désirent publier ont intérêt à n’envoyer qu’une dizaine de poèmes à la fois auprès d’un maximum de revues et à recommencer tous les ans. A la fin du fin, ils se feront connaître.

*

Fiche signalétique

La Nouvelle Tour de Feu
Adresse : 8 bis rue Lormier, 91580 Etréchy
Tél : 01 60 80 24 33
Directeur de publication : Michel Héroult (en tant que président de l’association Editions du Soleil natal)
Rédacteur en chef : Liliana Klein
Membres du comité de rédaction : Pierre Chabert, Françoise Chauveau, Maurice Cury, Denis Emorine, A.D. Grad, Jean-Pierre Joyeux, André Lagrange, Bernard Landry, Roland Nadaus, Françoise Poirier, Pierre Roudy, Jean-Claude Roulet, Jean-Claude Tardif, Guy Valensol.
Année de création : 1982
Périodicité : trimestrielle
Nombre de pages : 110
Impression : duplicopie Riso à encre
Format : 24,2 x 16,7 cm
Brochage : dos carré collé
Couverture : 4 couleurs en 4 passages sur Riso
Illustrations : oui
Photos : noir et blanc et couleur
N° ISSN : 029 4409030
N° CPPAP : néant (perdu)
Prix au numéro : 8 €
Prix de l’abonnement : 25 € (France) – 30 € (étranger)
Tirage : 400
Nombre d’abonnés : 150 (dont bibliothèques universitaires étrangères)
Service de presse : 150
Diffuseur : CEDIF/Alpro (pour certains numéros spéciaux)

jeudi, 26 avril 2007

Sur le style

« Le style me fait horreur et je m'aperçois que quand j'écris j'en fais toujours, alors je brûle tous mes manuscrits et il ne reste que ceux qui me rappellent une suffocation, un halètement, un étranglement dans je ne sais quels bas-fonds parce que ça c'est vrai. »

Antonin Artaud, Interjections.
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jeudi, 12 avril 2007

Le club des pantouflards, de Christian Cottet-Emard

medium_clubdespantouflards.jpg

 (Cet article, plus complet que celui que j'avais consacré l'an dernier à ce livre sur mon blog, est paru dans La presse Littéraire n° 9.)

 

Christian Cottet-Emard, qui anime avec humour et lucidité l’un des meilleurs blogs littéraires du moment (http://cottetemard.hautetfort.com), et qui s’est fait connaître comme poète, nouvelliste et romancier (Le grand variable, chez Editinter) vient de publier, dans la collection Petite Nuit, chez Nykta, un savoureux mini-polar, Le club des pantouflards.

L’histoire – relevant davantage de la politique-fiction que du genre policier - se situe dans le quartier lyonnais de Vaise, entre la rue Gorge de Loup et le pont Masaryk, un quartier jadis ouvrier (l’entreprise de la Rhodia), aujourd’hui déshérité mais en pleine rénovation, où quelques bobos aménagent des lofts dans les friches industrielles. Le héros, qui n’a rien d’héroïque, répond au nom improbable d’Effron Nuvem, et mène une vie grise de chômeur solitaire, celle d’un contemplatif sans autre perspective que la lecture de livres de poches (dont Les âmes mortes, de Nikolaï Gogol) et la consommation de sardines à l’huile portugaises Roses de France et de cafés au lait avec tartines. Tous ses espoirs semblent derrière lui : « Ses grands rêves d’adolescence le visitèrent. Ils étaient quant à eux de beaux papillons de jour mais ils avaient fait le chemin à l’envers, retournant vite aux chrysalides puis aux larves qui le rongeaient de l’intérieur. »

Une vie morne, vide et fermée où l’insolite s’invite, sous la forme d’une paire de pantoufles que Nuvem décide de s’offrir, d’une manière irraisonnée. Il ne s’étonne pas de l’étrange sollicitude du marchand de chaussures, qui l’invite bientôt au repas trimestriel du « club des pantouflards », un cercle fermé où les notables tirés à quatre épingles dînent et s’empiffrent de mets fins, pantoufles aux pieds. Cailles, grives, pigeons, faisans aux quatre choux, la nourriture abondante et choisie est dispensée par l’énorme Graziella. Quantité et qualité se conjuguent à la table : « un goûter composé de petits sandwiches au foie gras, de brioches, de choux à la crème, de crêpes, de babas au rhum, de petits-fours et de fruits confits, le tout arrosé de vieux porto et de muscat de Sardaigne. » Notre héros, qui a des prédispositions certaines pour la bonne chère, allume un Lusitania et boit de grandes rasades de Cognac.

Mais que vient-il faire dans cette galère, même aux allures de paradis gastronomique ? « Que pouvait valoir l’adhésion d’un chômeur, une de ces « âmes mortes » à peine bonnes à émigrer d’un fichier à un autre au gré des fluctuations d’une comptabilité d’actifs et de passifs que se jetaient sans cesse à la figure lors de joutes télévisées les dignes héritiers de l’escroc Tchitchikov ? » C’est là que le roman devient une fable politique angoissante : ce club ressemble en effet  à une phalange secrète et présente une liste aux élections municipales, sans succès. Bientôt Effron Nuvem voit la ville basculer dans une organisation totalitaire dont il devient, grâce à ses relations pantouflardes, l’un des employés, affecté au service du broyage des documents administratifs. Un engin monté sur chenilles entièrement revêtu d’un blindage noir trône au milieu de la place du quartier, assurant la surveillance de la ville, et la délivrance d’argent et de formalités administratives par une seule et même carte de crédit, sésame contrôlé et délivré par les autorités, comme si dans ce pays venait de se réaliser la crainte du croisement des fichiers informatiques. « Dans cette masse de métal compact dépourvue de toute ouverture luisait une petite lueur rouge de la taille d’un œilleton. » Ce blindé est une belle trouvaille romanesque, big brother matérialisé dans un engin militaire, inamovible et menaçant.

Le héros ne s’en formalise pas, et ne se pose jamais de questions, content de sa tâche répétitive au sous-sol de la mairie. Autour de lui, les opposants se font d’ailleurs rares et peu combatifs, les belles âmes éprises de liberté attendant les beaux jours pour défiler dans la rue. « Maintenant que les gens retrouvaient leur climat habituel et que la douceur des températures incitait à sortir se promener, l’élite citoyenne de la population se sentait incommodée par la présence silencieuse mais insistante du blindé. » Mais après cette molle résistance, le confort prend le dessus, les commodités du système gagnent chaque jour les faveurs des plus contestataires.

Dans ce livre, de la taille d’une longue nouvelle, on retrouve l’originalité de l’inspiration et la maîtrise de l’écriture, le sens du fantastique et les talents de conteur de Cottet-Emard. Cette fantaisie si pleine d’humour et de portraits truculents (l’éléphantesque Graziella, le petit gros à moustache, le vieux maigre aux allures d’insecte) baigne dans une atmosphère kafkaïenne. A l’ouverture du roman, le nom de Nuvem disparaît d’un fichier d’ordinateur ; à la fin il est à nouveau supprimé : « crédit épuisé carte non valide ». Victime impuissante et quasi consentante d’une machination obscure, il n’est qu’un pion : « Les pantoufles d’Effron Nuvem arpentaient de vastes carrés de bitume qui passaient du noir au blanc, réduisant sa silhouette à celle d’un pion sur cet échiquier dessiné par la lune. » Le héros descend les neuf cercles de l’enfer, mais il n’est pas la seule victime dans ce monde cruel et burlesque où les rivalités pour le pouvoir autorisent tous les coups, jusqu’à l’élimination du concurrent ou du prochain.

Le rire que l’on éprouve à la lecture est vite mêlé de malaise et d’inquiétude, comme si nous étions plus proches de ce monde qu’on ne voudrait le croire, pas même à la distance d’un rêve ou d’un cauchemar. Cottet-Emard excelle à nous décrire l’individu broyé et effacé par la politique de l’absurde.

 

Le club des pantouflards, de Christian Cottet-Emard, Ed. NYKTA, collection Petite Nuit. 80 pages, 5 €.

 

Descriptif et références complètes sur le blog de l'auteur :

http://cottetemard.hautetfort.com/archive/2006/06/19/le-c...

 

19:25 Publié dans Lectures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : Littérature, Culture

samedi, 24 mars 2007

Bukowski lit ses poèmes

Les fanatiques de Bukowski peuvent trouver sur le site Youtube plusieurs vidéos montrant l'auteur lisant ses propres poèmes.

Un exemple parmi bien d'autres :

 

Bukowski reads "The Secret of My Endurance"

mardi, 20 mars 2007

Revue de détail n° 7

(Ces chroniques sont parues dans La Presse littéraire n° 8.)

 

LA FAUTE A ROUSSEAU n° 42

medium_Fauterousseau42.2.jpgRevue de l’APA (Association pour l’autobiographie et le patrimoine autobiographique, désormais reconnue d’intérêt général), La Faute à Rousseau paraît trois fois par an. Diffusée aux adhérents, elle commence maintenant à être distribuée en librairies. Elle rend compte des activités de l’association, offre des notes de lectures et présente un dossier. Celui du dernier numéro, dans la continuation du précédent consacré au « Nom », explore le thème des « Familles ». « Le 13 juillet 1980, Julien Green note dans son Journal : « Quand j’ai demandé à Mauriac pourquoi il n’écrivait pas son autobiographie, il m’a répondu : Impossible. J’ai une famille. » Sans doute les familles n’apprécient-elles guère les autobiographies de leurs membres, dès lors qu’ils cherchent à dire leur vérité plutôt qu’à fixer l’histoire collective du clan. Sans doute aussi chacun doit-il construire son identité, trouver sa voie, à partir des histoires, projets ou conflits des générations antérieures. »

Beaucoup de collaborations sur ce thème, couvrant la période contemporaine. Le plus intéressant est le dossier « Classiques », avec les contributions sur Hugo, Sartre, Gide, Virginia Woolf, Mauriac. Philippe Lejeune livre un bel article sur Jean-Jacques Rousseau : «  La faute à Rousseau, c’est d’avoir abandonné ses cinq enfants. La faute à Voltaire, c’est d’avoir révélé ce fait au public dans un pamphlet anonyme. Merci à Voltaire, qui poussa Rousseau à écrire, en réponse, ses Confessions. Merci à Rousseau de s’y montrer – c’était très nouveau pour l’époque – attentif à l’histoire de la personnalité, et sensible à l’existence de l’inconscient. »  Et d’ajouter : « Lecteur des Confessions, je vais donc jouer mon rôle en remarquant un « enchaînement d’affections secrètes » qui a échappé à Rousseau, un chaînon manquant, une « disjonction » étonnante. Jamais, dans les Confessions, Rousseau n’établit de lien entre les deux faits suivants : il a abandonné ses enfants, mais il avait été lui-même abandonné par son père, comme le Petit Poucet. »

Sans tomber dans le piège de la spécialisation universitaire ou de l’hermétisme, La Faute à Rousseau offre un contenu accessible, riche et varié - seul un effort de mise en page reste à faire, pour éviter l’impression d’empilement des articles. Rappelons que l’APA, fondée en 1991 par Chantal Chaveyriat-Dumoulin et Philippe Lejeune, réunit actuellement plus de 800 membres adhérents. Son premier objectif est d’assurer la conservation des textes autobiographiques inédits rédigés par des personnes de tous milieux sociaux. La plupart de ces textes, malgré leur intérêt, ne pourraient pas trouver d’éditeur en raison du manque de notoriété des auteurs ; dispersés dans les archives familiales, ils sont menacés de disparition à plus ou moins long terme. Le lieu de cette conservation est la médiathèque municipale de la Grenette, dont une partie est mise à la disposition de l’APA par la municipalité d’Ambérieu-en-Bugey, près de Lyon. L’APA publie des comptes rendus des textes autobiographiques reçus (les échos) dans son « Garde-mémoire ». Elle offre en lecture son fonds, riche de plus de 2000 dépôts inédits, dont l’intérêt, au-delà d’un genre littéraire, est également historique et sociologique.

 

La Faute à Rousseau, APA, La Grenette, 10 rue Amédée-Bonnet, 01500 Ambérieu-en-Bugey. 84 pages, 9 €. http://sitapa.free.fr

 

 

LES MOMENTS LITTERAIRES n° 15 et n° 16

Projet original que celui de cette belle revue semestrielle animée par Gilbert Moreau, d’une présentation sobre et classique, « à l’ancienne », qui privilégie l’écriture intime et publie journaux intimes, carnets, correspondances et récits autobiographiques… prolongeant chaque fois une riche réflexion sur la source et les rites de l’écriture. Des dossiers ont été consacrés à Annie Ernaux, Gabriel Matzneff, Hubert Nyssen, Charles Juliet, Henri Bauchau…

Le numéro 15 donne à lire un dossier Rezvani, avec une introduction de Bertrand Py, son nouvel éditeur, des extraits des Carnets de Lula, sa femme défunte, et une interview de l’auteur pleine de fulgurances : « Je ne prémédite pas mon travail. Je me sers de la peinture, de l’écriture ou même de la musique comme moyen d’extraction de ce qui se passe dans mon esprit. Ce qui m’intéresse, c’est ce que je ne sais pas. Du moment où l’on se met à écrire, il sort de vous des choses tout à fait inattendues. Dans une lettre à sa sœur, Kleist écrivait « les mots tirent la pensée. » C’est ça qui est passionnant. » Rezvani établit des rapprochements et des comparaisons entre les divers arts qu’il a pratiqués pour définir l’écriture : « Quand je me suis mis à écrire, je me suis cru délivré de la matérialité, je pensais pouvoir écrire dans un bistro, en voyage… En réalité, pas du tout, je me suis aperçu que l’écriture était beaucoup plus prenante, ritualisée, qu’elle vous enferme, vous rend maniaque. » et son approche de l’ordinateur et du traitement de texte est originale : « Depuis quelques années, je me suis mis à l’ordinateur. C’est un moyen extraordinaire. Etrangement je trouve que le travail d’écriture devient comme de la sculpture avec de la glaise. A l’ordinateur, les phrases deviennent une matière, il y a un côté plastique assez extraordinaire. » Signalons dans cette même livraison de savoureux portraits par Robin Wallace-Crabbe, peintre et écrivain australien.

Le numéro 16 est consacré à une longue expérience d’écriture à quatre mains (expression qui m’a longtemps hérissé du temps de l’écriture à la plume mais qui retrouve un peu de vérité avec l’écriture au clavier, le rapprochement avec le piano devenant légitime) menée par Daniel Zimmermann et Claude Pujade-Renaud. Une aventure bien exceptionnelle car l’écriture est par essence un exercice solitaire. Hugo Marsan présente l’histoire d’amour et de littérature de ce duo littéraire, « la danseuse et le funambule, la bourgeoise et le prolétaire ». Là aussi, une interview pleine d’enseignements sur les pratiques d’écriture en commun, conduite. par Gilbert Moreau, et illustrée par des extraits d’un « cahier des rêves ». Claude Pujade-Renaud revient sur la genèse de cette collaboration : « Nous avons continué à nous montrer les ébauches de ce que nous écrivions chacun de nôtre côté. L’essentiel était l’existence d’un destinataire immédiat, une écriture avec l’autre, pour l’autre et d’une certaine façon contre l’autre parce que, inévitablement, s’instaurait un rapport de rivalité, de défi. » Pour elle le travail d’écriture est « toujours très long, très laborieux » et est incomparable avec la musique : « dans l’écriture, le signifiant est là, bête, épais, incontournable. »

 

Les Moments littéraires, B.P. 175, 92186 Antony Cedex. 128 pages, 12 €

 http://perso.wanadoo.fr/les.moments.litteraires/