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jeudi, 24 janvier 2008

Mercure, une nouvelle revue

Naissance d'une nouvelle revue, dirigée par Anthony Dufraisse : Mercure, les médias autrement.

(Je lui consacrerai prochainement une chronique dans La Presse Littéraire.)

 

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Sommaire :

POSITIONS
Christian Ruby, Vladimir Bertrand : Qu’est-ce qui nous regarde ? (I)
Jacques Attali : Penser labyrinthe.
Manuel de Dieguez : Internet et la nouvelle élite mondiale.
Claude Régy : Des médias au médiat.
Didier Nordon : L’information est une désinformation.
Vangelis Athanassopoulos : Notes sur l’artiste médiatique.

SITUATIONS
Fatima Ait Bounoua : Beurettes sur le net.
Rodolphe Adam : Malaise dans l’e-culture.
Daniel Sibony : Les enfants devant la télé.
Cyril Thomas, entretien avec Agnès de Cayeux : Expériences d’intrusion.

RADIOGRAPHIE
Gil Jouanard : Radio, art de l’intime.
Olivier Pascault : Émission(s) philosophique(s), suivi de : Jaspers, Adorno, Anders... Des philosophes allemands sur les ondes.

FIGURES LIBRES
Franck Derex : Dernière édition de l’homme.
Jacques Rigaud : Monsieur l’Intran.
Christian Cottet-Emard : Souvenirs d’un localier.

Abonnement à MERCURE :
Mercure paraît quatre fois par an. Pour toute correspondance : revuemercure@free.fr
Abonnement pour 1 an (4 numéros) : 35 euros.

Abonnement de soutien : montant libre.
Prix d’un numéro : 10 euros.
Règlements à établir par chèque à l’ordre de l’Association Mercure et à adresser à Anthony Dufraisse, 14 avenue Foch, 95100 Argenteuil.

 

mercredi, 05 décembre 2007

Revue de détail n° 10

(Ces chroniques sont parues dans La Presse Littéraire n° 11)

 

CODEX ATLANTICUS n° 16

586e6d3fd14608d8104fff69327b00b8.gif« Le Codex Atlanticus paraît théoriquement une fois l’an, au solstice d’été, quand tout va bien. » Après être passée par différentes présentations et avoir connu des périodicités très diverses, la revue animée par Philippe Gindre est désormais devenue une anthologie fantastique annuelle. Des auteurs contemporains, des nouvelles courtes et, chaque fois, un ou deux textes d’auteurs anciens, oubliés ou méconnus car l’oubli ne doit pas être une sorte de sanction, et le passé contient des trésors à exhumer.

On retrouvera entre autres dans cette 16e livraison Philippe Gontier, Timothée Rey, Kevan Stevens, Sylvie Huguet, Léonor Lara, l’espagnol Santiago Eximeno, et en invités du passé, Maurice Level et Charles Asselineau, ce dernier resté principalement dans la mémoire littéraire pour son amitié avec Baudelaire. Les illustration sont signées Dominique Laronde, Ferran Clavero, Philippe Gontier et Daria Bianchi.

L’éditeur de cette belle revue, qui allie la qualité des textes et des dessins et le soin apporté à la réalisation, est la Clé d’Argent, association créée en 1987. Celle-ci doit son nom à une nouvelle de l’écrivain américain Lovecraft, ce qui, pour les fondateurs Philippe Gindre et Philippe Dougnier, est une manière de rendre hommage à ce personnage littéraire hors normes et d’indiquer que c’est la littérature fantastique au sens large qui les intéresse. Ni l’horreur purement physique, ni le merveilleux ou l’imaginaire pur, mais tout ce qui se trouve à mi-chemin, tout ce qui bouleverse subtilement le réel, ou notre perception du réel.

La Clé d’Argent publie également des auteurs classiques et contemporains du fantastique, des essais, et deux collections d’ouvrages populaires Ténèbres & Cie, et Le Club Diogène. Son site internet vaut le détour, il est riche, agréable, bien structuré, et surtout il permet aux visiteurs acheteurs de commander directement et de payer en ligne grâce au système PayPal, une manière de compenser l’absence de diffusion en librairies. Car, dit Gindre, « Combien de petits éditeurs se sont effondrés financièrement ces dernières années pour avoir voulu à tout prix se faire diffuser par les réseaux classiques ? » Mais depuis 20 ans, l’affaire tourne, à son rythme. « Jusqu’à présent nos livres ont toujours fini par trouver leurs lecteurs, c’est l’essentiel. »

 

Codex Atlanticus, La Clé d’Argent éditeur, 22 avenue Pompidou, 39100 Dole. 80 pages, 10 €.

www.codex-atlanticus.org

 

 

CONTRELITTERATURE n° 19

 

f371b919f12a0dcb35f8f118a34a762e.jpg« Non pas une littérature contraire, mais le contraire de la littérature » est-il précisé en sous-titre de cette revue qui s’inspire du mot de Joseph de Maistre : « Le rétablissement de la monarchie, qu’on appelle contre-révolution, ne sera point une révolution contraire, mais le contraire de la révolution. » Sur le thème du « Théâtre du Verbe », ce numéro 19 met en scène Antonin Artaud, Valère Novarina, Malcolm de Chazal, Roberto de Simone, Fabrice Hadjadj, Henry le Bal. Suit un dossier poésie consacré à Patrice de la Tour du Pin, une étude sur la musique de Philip Glass et les actes de la journée Talvera du 9 décembre 2006.

Alain Santacreu opère le rapprochement Novalis/Novarina en nous rappelant d’abord le texte fondamental et énigmatique de Novalis, écrit en 1798, « Le monologue » : « C’est une drôle de chose que de parler et d’écrire ; la vraie conversation, le dialogue authentique est un pur jeu de mots. Tout bonnement ahurissante est l’erreur ridicule des gens qui se figurent parler pour les choses elles-mêmes. » Novarina, l’un des dramaturges les plus novateurs du théâtre contemporain avec une vingtaine de pièces, affirme parallèlement qu’écrire est une « cure d’idiotie » et cherche le moment « où la parole a lieu toute seule ». Françoise Bonardel livre un article intéressant sur Antonin Artaud et la tragédie du Verbe : « Artaud aurait-il intenté au langage un si virulent procès s’il n’avait été assuré de l’existence d’un autre langage, plus organique d’ailleurs que verbal ? »

Définissant la « contrelittérature », Alain Santacreu précise qu’elle n’est pas un mouvement artistique mais un état d’esprit à la fois réactif et progressiste : « Réactif, parce qu’il repose sur une anthropologie ternaire fondamentale qui inclut le spirituel dans l’homme ; et progressiste, parce qu’il se fonde sur une positivité du temps ». Pour les tenants du Manifeste Contrelittéraire, qui veulent se situer dans une « écologie de l’esprit », la littérature est apparue au 18e siècle et correspond à l’émergence de l’esprit philosophique de la modernité ; elle fut le choc en retour du rejet de la dimension mystique par le christianisme occidental, et se caractérise aujourd’hui par la littérature du moi, la platitude narcissique et le nombrilisme des egobiographies. La contrelittérature veut réintroduire la mystique dans l’œuvre artistique, renouer avec la tradition du Livre et une antériorité oubliée. En théâtre, elle cherche un dépassement du spectacle et des simulacres de l’acteur, le corps du spectateur devenant le lieu dramaturgique de la dépossession, et se réclame des principes d’Antonin Artaud. L’action créatrice est donnée à l’homme, comme par surcroît, après effacement de son ego.

Même si sa vision peut paraître radicale, cette revue ambitieuse, exigeante, ouvre des chantiers de réflexion passionnants en convoquant de grands noms de la littérature et de la pensée.

 

Contrelittérature, L’Ancien Presbytère, 28170 Saint-Ange. 44 pages, 6 €. http://talvera.hautetfort.com

 

samedi, 13 octobre 2007

Le site de La Presse Littéraire

Joseph Vebret vient d'ouvrir le site de La Presse Littéraire.

"Quant aux auteurs de la revue, que forment-ils ? Un groupe, un cercle, une bande, un réseau ? On pourrait parler de mouvance ; Gide préférait le mot « circuit » qui suggère bien l’existence de cercles concentriques et communiquant.
La presse Littéraire entend modestement, et à son niveau, se positionner comme un lieu de passages et de convergences, voire même de divergences profondes. Elle se revendique ouverte, tolérante, nécessairement subjective, passionnée, sans ligne préétablie et sclérosante, mais avec une ambition : donner à voir et à penser."

 

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dimanche, 09 septembre 2007

Revue de détail n° 9

(Ces chroniques sont parues dans La Presse Littéraire n° 10) 

 

e42aa35a344ec5b037d9e6ee13cedb53.jpgCARBONE n° 1 et n° 2

Les éditions Le Mort-Qui-Trompe, parallèlement à leurs ouvrages, publient Carbone, une revue pluridisciplinaire au petit format poche, agréablement mise en pages, et dirigée par Axelle Felgine. Carbone se définit comme une « revue d’histoire potentielle, pour animer le souffle des futurs possibles, pour sonder le réel à la lumière de ses récits ». Espace de réflexion et de création, elle réunit trois fois par an des artistes, des écrivains et des penseurs de tous horizons pour offrir un regard original sur de grandes problématiques contemporaines. Chaque numéro s’ouvre sur un entretien, puis rassemble récits et textes critiques sur un même thème, créant des passerelles entre les genres.

Le numéro 1, consacré au thème de l’Esclave, démarre très fort par une rencontre avec Juan Asensio, le créateur du site « Stalker, Dissection du cadavre de la littérature », que Laurent Schang présente ainsi : « Grand contempteur du cirque médiatico-littéraire devant l’Eternel, Juan étrille ou encense, vitupère ou porte aux nues, éreinte ou étreint. Au risque, assumé, de verser parfois dans l’outrance verbale, lorsque par exemple il s’en prend à la personne plutôt qu’à l’écrivain. Les livres sont sa religion et sa foi a l’ardeur des fanatiques. » Le tenancier de « Stalker» (http://stalker.hautetfort.com), site devenant au fil du temps une impressionnante base de connaissances et de critiques alimentée par Asensio et ses invités, nous entretient, avec sa passion érudite et éclairée, de ses auteurs de prédilection : Bernanos, Bloy, Gadenne, Conrad, Faulkner, Broch, Sabato… et redonne ses lettres de noblesse à la fonction critique : « Un critique est d’abord un filtre, c’est là son office, complétant la mission de vigie que Sainte-Beuve lui avait assignée. »

Le numéro 2 s’organise autour du thème de la fin (fin du monde, fin de civilisation, fin de vie, fin de partie, fin de l’histoire…) et s’ouvre par un entretien avec Jean-Pierre Andrevon, figure phare de la littérature de science-fiction française, mais aussi peintre, dessinateur et compositeur : « Peu importe que l’homme disparaisse, tant que la Terre demeure ». L’auteur de « Le Monde enfin » parle des espèces qui ont disparu, bientôt, sur cette fâcheuse lancée, d’autres disparaîtront. « Pourquoi pas l’Homme ? Nous sommes des animaux comme les autres, accrochés à la branche ultime. Elle est fragile, du fait même de notre propre poids. »

Lucien Suel, Jean-Claude Tardif, Marc Alpozzo, Hélèna de Angelis, entre autres participants, apportent leur concours à cette entreprise prometteuse.

 

Carbone, 1 chemin de la Pelouse, 54136 Bouxières-aux-Dames. 128 pages, 8 €. www.le-mort-qui-trompe.fr

 

 

LE CANARD EN PLASTIC n° 2

Semestrielle, cette « petite revue de littératures et d’images » a belle allure, sous sa couverture pimpante colorée ocre et bleu, et son logo rigolo de canard. Elle s’ouvre en fanfare par l’édito d’Edith (référence involontaire à feue la revue Casse dont l’intro était signée Edith O. ?) Elle met en scène des auteurs reconnus et publiés chez de grands éditeurs (Pierre Autin-Grenier, Jacques Gélat, Georges Picard) et de jeunes auteurs en devenir, « plus verts, ayant peu ou n’ayant jamais rien publié » (Allain Robert, Jean-Michel Binsse, Gustave Shadek, Thomas Leclere). Entre chacune de leurs contributions, on retrouve les élégants dessins de rues de Rozenn Brécard, ce qui donne une unité à l’ensemble. « Rozenn Brécard n’est pas née à Paris en 1972. Elle n’est ni tout à fait gauchère, ni tout à fait droitière. Elle n’est pas non plus tout à fait ambidextre et s’est mise à dessiner pour des raisons pratiques indépendantes de sa volonté. » Toutes les petites notices bio-biblio sont du même tonneau, privilégiant l’humour et le recul. Une revue qui ne se prend pas au sérieux, mais dont le projet éminemment sérieux, solide et à suivre, est ainsi défini sur son site internet : « Sans vouloir faire chapelle : une littérature généreuse et cultivant volontiers le décalage, une littérature un peu drôle, un peu noire, un peu bizarre, paradoxale ou fantastique. »

 

Le canard en plastic, 91 rue de la Fraternité, 93100 Montreuil-sous-Bois. 128 pages, 12 €. www.lecanardenplastic.net

 

 

LE GROGNARD n° 1

Cette nouvelle revue trimestrielle, publiée en partenariat avec le site Georges Palante et Le Grenier des Insoumis, illustre la crise que traverse actuellement la revue papier, que le web concurrence et fragilise sans la remplacer vraiment. Le Grognard (Littérature, Idées, Philosophie, Critique et Débats) est une revue disponible uniquement sur internet, mais sa présentation se veut « à l’ancienne ». Stéphane Beau, instigateur du projet, précise que son optique esthétique louche résolument vers les revues des années 1900 : Le Mercure de France, La Revue Blanche, La Plume, ainsi que vers les revues anarchistes et individualistes qu’ont été L’En Dehors, L’Unique, L’Ordre Naturel, La Mêlée… Dernier né de cette famille, Le Grognard s’adresse aux nostalgiques de ces volumes anciens que l’on coupe au couteau avant de les lire, aux amateurs de culs-de-lampes, de fleurons et de lettres ornées, et à tous les amoureux des vieux papiers, « des pages jaunies et cassantes que l’on manie avec délicatesse et tendresse. Bref, à tous ceux qui, bien que fermement convaincus des merveilleuses opportunités offertes par l’univers internet, continuent à vouer aux livres et au support papier une adulation sans réserves ». La déclaration est séduisante, comme l’aspect sur écran (où le texte s’encadre entre lettrines et vieilles illustrations), mais quand on imprime la revue pour avoir la « version papier », on se retrouve tout bêtement avec sa pile de feuilles de papier blanc A4 80 grammes, bien loin du support ancien, de la typographie sur papier bouffant, du format original, et de tous les charmes de l’objet revue. C’est la contradiction d’un tel projet.

Le contenu est intéressant, mêlant textes actuels (Christine Lartigue, Vincent Dubuc, Thierry Guérin, Olivier Brochiera) et textes oubliés, ainsi un article de Frantz Jourdain paru en 1901 dans La Plume. Ygor Yanka publie dans cette livraison un extrait de son roman inédit Eros cui-cui.

 

Le Grognard, Gratuit, 32 pages. http://perso.orange.fr/legrognard

 

jeudi, 14 juin 2007

Revue de détail n° 8

(Ces chroniques sont parues dans La Presse Littéraire n° 9.)

 

LA SŒUR DE L’ANGE n° 4

b0293fa0ff60a956a3834ba9b67cd819.jpgLes éditions Le Grand Souffle ont eu l’heureuse initiative de faire renaître la revue semestrielle de philosophie et de littérature La Sœur de l’Ange, prématurément disparue suite au dépôt de bilan de son précédent éditeur « A Contrario ». On se souvient de ces belles et imposantes livraisons, la qualité le disputant à la quantité, et qui s'articulaient sur un thème : A quoi bon l'art ? A quoi bon la nation ? A quoi bon mourir ?

Le 4ème numéro a pour thème : « A quoi bon Dieu ? », et l'ambition est toujours la même : poursuivre une aventure intellectuelle et humaine indispensable à la vie culturelle menacée de notre temps. « En philosophie comme en littérature, contre la culture du consensus et l’idéologie molle du spectre démocratique, La Sœur de l’Ange allume le feu de la vie ascendante en rappelant la vertu de la confrontation créatrice. « Que chacun sache en quoi il n’est pas d’accord avec l’autre » est l’une des conditions pour qu’un parlement textuel se rende capable d’ouvrir de nouveaux horizons. »

L'introduction de Debord donne le ton : « Les personnes qui n'agissent jamais veulent croire que l'on pourrait choisir en toute liberté l'excellence de ceux qui viendront figurer dans un combat, de même que le lieu et l'heure où l'on porterait un coup imparable et définitif. Mais non : avec ce que l'on a sous la main, et selon les quelques positions effectivement attaquables, on se jette sur l'une ou l'autre dès que l'on aperçoit un moment favorable ; sinon, on disparaît sans avoir rien fait. » Frédéric Houdaer présente un texte savoureux d'Alexandre Vialatte, « La religion veut entrer dans un cercle carré », dans lequel le sage auvergnat nous explique par un humour des plus convaincants pourquoi la religion est fondée sur un dogme immuable : « On voudrait un cercle carré. « Tout change, pourquoi pas la religion ? » Parce qu'une circonférence est forcée de rester ronde. Parce qu'elle y est tenue par sa définition. »

Au sommaire encore : Didier Bazy, Andrée Chédid, Alain Jugnon, Falk van Gaver, André Chouraqui, Philippe Corcuff, Yannis Constantinidès, Ludwig Feuerbach, Michel Crépu, Jean Luc Moreau parmi bien d’autres contributions et des lettres inédites d’André Rolland de Renéville, René Daumal et Roger Gilbert-Lecomte.

La Soeur de l'Ange matérialise un espace où s'expriment philosophes, théologiens, écrivains, où l'on convoque Abellio, Bernanos, Nietzsche. Confrontées, juxtaposées, sans guerre ni concession, les paroles des athées et celles des croyants se rencontrent dans ce chantier ouvert, d'une réelle démocratie. Un espace unique où chaque pensée est libre d'exister, en relation avec l'altérité. Voilà qui nous change heureusement du militantisme excommunicateur.

La Sœur de l’Ange, Le Grand Souffle éditions, 24 rue Truffaut, 75017 Paris. 252 pages, 18,50 €. http://revuelasoeurdelange.hautetfort.com

 

 

MERCURE LIQUIDE n° 4

Cette revue littéraire et graphique semble revenir de loin. On peut lire en effet dans le dernier numéro paru : « Vous tenez entre vos mains Mercure liquide n° 4, dernier numéro de la revue à se produire sur papier. »  Mais l’aventure, assurent les responsables, continuera sur le web, une revue en ligne enrichie de musique, de vidéo, de portraits des artistes publiés, d’un espace de résidences online… Fidèle au principe même du mercure, matière inaltérable symbole de transformation, la revue espère se prolonger sous d’autres formes. Mais ce n'était qu'une fausse alerte. Mercure liquide annonce désormais sur son site que le numéro 5 paraîtra en février 2007, grâce à une subvention accordée par la région Rhône Alpes, la première depuis le début de cette aventure éditoriale. Le numéro 4 est un superbe objet, dont la conception graphique est due à Safran. L'ensemble vaut par ses textes (trois des auteurs présents, Samuel Gallet, Silvère Valtot, Thibaut Fayner sont passés par les classes d'écriture dramatique de l'ENSATT) mais surtout par ses collaborations artistiques, dont les photos réalisées par Franck Boutonnet dans les bidonvilles de la banlieue lyonnaise, conciliant art et humanité. La revue, moins littéraire qu'artistique, a une réelle unité, probablement due à la complicité et à la communauté d'esprit des contributeurs.  

Mercure liquide, 21 rue Duhamel, 69002 Lyon. 84 pages, 7€. www.mercureliquide.com

 

 

PASSAGE D’ENCRES n° 26

 8231c52b3064917549f88452957009b6.jpgSous titrée art / littérature, cette revue de prestige, d'un grand format original quasi carré, faisant la part belle au dessin et à la photographie, est éditée par l’association Passage d’encres, dont le but est la promotion, le développement et la diffusion des arts graphiques. Animée par Christiane Tricoit, et forte d’un solide comité de rédaction, elle sort 3 numéros par an. « Nulles parts » est le thème de ce dernier numéro, coordonné par Yves Boudier et Jean-Claude Montel. Dans l'introduction, « Sur le carnet de l'arpenteur », Boudier présente l'axe de réflexion : « S'il est un domaine de notre présence au monde qui conjugue au plus étroit politique et ressenti naturel, c'est bien celui que l'on nomme paysage. Lié à notre histoire commune, indéfectiblement uni à nos vies, il est avant tout culture. Il se constitue et se révèle à travers l'ensemble des actes par lesquels notre volonté l'impose, le construit, le détourne, l'altère, le transforme, souvent même le détruit. » Suivent de superbes photos noir et blanc d'Andoche Praudel, des paysages naturels corréziens qui « semblent vibrer d'une attente de l'impossible » selon la juste formule de Didier Laroque. Robert Groborne est l'artiste invité et livre un ensemble intitulé « L'ordre minéral », une série de lithographies alternées avec des poèmes de Joseph Guglielmi. Précisons que des petits livres sont également édités par l’association, dans les collections Traces, Trait court, Tiré à part, toutes dans l'alliance ou le dialogue de l'art et de la littérature.

Passage d’encres, 16 rue de Paris, 93230 Romainville. 104 pages, 19 €  www.passagedencres.org      

                                  

mardi, 01 mai 2007

Rencontre avec La Nouvelle Tour de Feu

medium_ntdf44.jpgLa Tour de Feu a été une revue mythique, qui a compté dans l’histoire de la littérature. Elle survit et se renouvelle sous la direction de Michel Héroult, qui a créé La Nouvelle Tour de Feu. Une rencontre pour découvrir quelle est la part de la tradition, et celle de l’innovation.
(Cet entretien publié voici quelques années dans Ecrire & Editer a été actualisé par Michel Héroult en avril 2007.)

Jean-Jacques Nuel : Comment est née la NTDF ? Quelle continuité entretient-elle avec la mythique Tour de Feu ?
Michel Héroult : En 1981, Pierre Boujut annonce la fin de la Tour de Feu. Je propose, avec Liliana Klein, de continuer avec le titre « La Nouvelle Tour de Feu ». Je figure au comité de rédaction de l’ancienne Tour et j’ai fréquenté les congrès de Jarnac depuis 1961. Pierre Boujut donne son accord. Dans les premières années, la Nouvelle Tour de Feu publie surtout les collaborateurs de l’ancienne. Pierre Boujut meurt en 1992. La NTDF prend alors réellement son autonomie et accueille de nouveaux collaborateurs. Le ton change et une large ouverture vers la création contemporaine se fait. Il n’y a pas eu rupture avec la Tour de Feu de Pierre Boujut, mais lente évolution. A son tour, la NTDF entre dans le mythe.

JJN : La part des chroniques est importante. Une revue peut-elle se passer d’une partie informative ?
MH : Ce qui fait la spécificité d’une revue, par rapport à une anthologie par exemple, c’est justement d’informer. Les poètes se plaignent d’être mis à l’écart, mais les revues offrent une large compensation. Les « sacs à poèmes » sont illisibles. Il faut alterner les genres : critiques, courtes nouvelles, études, poèmes. De ce point de vue, la NTDF, je crois, a donné le bon exemple en diversifiant au maximum les signatures.

JJN : Pourquoi garder la même couverture à chaque numéro ?
MH : Il s’agit d’imposer une spécificité. Il suffit de la voir à deux mètres et la revue est tout de suite reconnue. Du point de vue technique, c’est plus pratique, mais je compense en variant les couleurs. Les illustrations à l’intérieur de la revue donnent de l’espace aux novateurs. L’acquisition d’un photocopieur en couleur a apporté une véritable révolution.

JJN : Comment diffusez-vous la revue ?
MH : Je suis parti du fichier de la Tour de Feu dont Pierre Boujut m’a fait cadeau en 1982. Des bibliothèques abonnées à l’époque le sont toujours. La Tour de Feu constituait une famille d’esprits et la plupart des abonnements se sont reportés sur la NTDF. Mais entre les « anciens » de la Tour et les « nouveaux », il y avait la différence d’une génération. Nombre des abonnés du début sont morts. Le fichier s’est renouvelé à l’image de la vie. L’essentiel des apports se fait par contacts directs et bouche à oreille. J’effectue un important service de presse.

JJN : La NTDF apparaît de l’extérieur comme un lieu d’amitié et de fidélité. Cette impression est-elle juste ?
MH : C’était vrai il y a vingt ans ; on se retrouvait une fois par mois, dans un restaurant parisien.
Bien avant, vers les années 60, il existait des rencontres hebdomadaires dans le Quartier Latin et des rassemblements à Jarnac vers le 14 juillet (Jean Follain voulait qu’on défile derrière la fanfare, mais ce n’était pas du goût de Pierre Boujut.) Des curieux passaient. Des drames se nouaient, se dénouaient. En fait, il y avait alors deux pôles de pouvoir : Jarnac où régnait Pierre Boujut et Paris où la fronde grondait souvent.
Depuis plus de vingt ans, la NTDF est toujours présente au Marché de la Poésie de la place Saint-Sulpice à Paris. Plusieurs rencontres ont eu lieu aussi à Guyancourt, où Roland Nadaus était maire. Il existe là-bas, ceinturant un plan d’eau, le chemin de la Tour de Feu et un édifice public porte le nom de Moreau du Mans. Ce dernier n’a jamais figuré dans le comité de rédaction de Pierre Boujut, mais la NTDF, depuis, a largement réparé cet oubli.
Un lieu, peut-être, reste à trouver. Voici la question : le train de la vie passe-t-il deux fois ? On peut penser que oui, puisque la NTDF compte maintenant un quart de siècle d’existence.

JJN : Répondez-vous aux envois de textes ? Quels conseils donneriez-vous aux jeunes auteurs désireux de publier ?
MH : Les courriers que l’on reçoit ne sont pas toujours « raisonnables ». Les Editions du Soleil natal ajoutent à la confusion. Quand on reçoit un pavé, est-ce pour la revue ? Pour un livre ? Parfois je téléphone et j’explique notre position : publication à dose modérée de poèmes à compte d’éditeur dans la revue ; refus de publication de poèmes à compte d’auteur. Dans la mesure où je fabrique moi-même les livres, la capacité de production est forcément réduite, d’autant plus que Soleil natal se retrouve aussi en position d’imprimeur ( revue A l’Index, que dirige Jean-Claude Tardif, et naguère recueil annuel d’un auteur décédé, et un bulletin municipal). Soleil natal publie à compte d’éditeur deux à quatre livres par an (Histoire en Essonne, ésotérisme et spiritualité). Les jeunes auteurs qui désirent publier ont intérêt à n’envoyer qu’une dizaine de poèmes à la fois auprès d’un maximum de revues et à recommencer tous les ans. A la fin du fin, ils se feront connaître.

*

Fiche signalétique

La Nouvelle Tour de Feu
Adresse : 8 bis rue Lormier, 91580 Etréchy
Tél : 01 60 80 24 33
Directeur de publication : Michel Héroult (en tant que président de l’association Editions du Soleil natal)
Rédacteur en chef : Liliana Klein
Membres du comité de rédaction : Pierre Chabert, Françoise Chauveau, Maurice Cury, Denis Emorine, A.D. Grad, Jean-Pierre Joyeux, André Lagrange, Bernard Landry, Roland Nadaus, Françoise Poirier, Pierre Roudy, Jean-Claude Roulet, Jean-Claude Tardif, Guy Valensol.
Année de création : 1982
Périodicité : trimestrielle
Nombre de pages : 110
Impression : duplicopie Riso à encre
Format : 24,2 x 16,7 cm
Brochage : dos carré collé
Couverture : 4 couleurs en 4 passages sur Riso
Illustrations : oui
Photos : noir et blanc et couleur
N° ISSN : 029 4409030
N° CPPAP : néant (perdu)
Prix au numéro : 8 €
Prix de l’abonnement : 25 € (France) – 30 € (étranger)
Tirage : 400
Nombre d’abonnés : 150 (dont bibliothèques universitaires étrangères)
Service de presse : 150
Diffuseur : CEDIF/Alpro (pour certains numéros spéciaux)

mardi, 20 mars 2007

Revue de détail n° 7

(Ces chroniques sont parues dans La Presse littéraire n° 8.)

 

LA FAUTE A ROUSSEAU n° 42

medium_Fauterousseau42.2.jpgRevue de l’APA (Association pour l’autobiographie et le patrimoine autobiographique, désormais reconnue d’intérêt général), La Faute à Rousseau paraît trois fois par an. Diffusée aux adhérents, elle commence maintenant à être distribuée en librairies. Elle rend compte des activités de l’association, offre des notes de lectures et présente un dossier. Celui du dernier numéro, dans la continuation du précédent consacré au « Nom », explore le thème des « Familles ». « Le 13 juillet 1980, Julien Green note dans son Journal : « Quand j’ai demandé à Mauriac pourquoi il n’écrivait pas son autobiographie, il m’a répondu : Impossible. J’ai une famille. » Sans doute les familles n’apprécient-elles guère les autobiographies de leurs membres, dès lors qu’ils cherchent à dire leur vérité plutôt qu’à fixer l’histoire collective du clan. Sans doute aussi chacun doit-il construire son identité, trouver sa voie, à partir des histoires, projets ou conflits des générations antérieures. »

Beaucoup de collaborations sur ce thème, couvrant la période contemporaine. Le plus intéressant est le dossier « Classiques », avec les contributions sur Hugo, Sartre, Gide, Virginia Woolf, Mauriac. Philippe Lejeune livre un bel article sur Jean-Jacques Rousseau : «  La faute à Rousseau, c’est d’avoir abandonné ses cinq enfants. La faute à Voltaire, c’est d’avoir révélé ce fait au public dans un pamphlet anonyme. Merci à Voltaire, qui poussa Rousseau à écrire, en réponse, ses Confessions. Merci à Rousseau de s’y montrer – c’était très nouveau pour l’époque – attentif à l’histoire de la personnalité, et sensible à l’existence de l’inconscient. »  Et d’ajouter : « Lecteur des Confessions, je vais donc jouer mon rôle en remarquant un « enchaînement d’affections secrètes » qui a échappé à Rousseau, un chaînon manquant, une « disjonction » étonnante. Jamais, dans les Confessions, Rousseau n’établit de lien entre les deux faits suivants : il a abandonné ses enfants, mais il avait été lui-même abandonné par son père, comme le Petit Poucet. »

Sans tomber dans le piège de la spécialisation universitaire ou de l’hermétisme, La Faute à Rousseau offre un contenu accessible, riche et varié - seul un effort de mise en page reste à faire, pour éviter l’impression d’empilement des articles. Rappelons que l’APA, fondée en 1991 par Chantal Chaveyriat-Dumoulin et Philippe Lejeune, réunit actuellement plus de 800 membres adhérents. Son premier objectif est d’assurer la conservation des textes autobiographiques inédits rédigés par des personnes de tous milieux sociaux. La plupart de ces textes, malgré leur intérêt, ne pourraient pas trouver d’éditeur en raison du manque de notoriété des auteurs ; dispersés dans les archives familiales, ils sont menacés de disparition à plus ou moins long terme. Le lieu de cette conservation est la médiathèque municipale de la Grenette, dont une partie est mise à la disposition de l’APA par la municipalité d’Ambérieu-en-Bugey, près de Lyon. L’APA publie des comptes rendus des textes autobiographiques reçus (les échos) dans son « Garde-mémoire ». Elle offre en lecture son fonds, riche de plus de 2000 dépôts inédits, dont l’intérêt, au-delà d’un genre littéraire, est également historique et sociologique.

 

La Faute à Rousseau, APA, La Grenette, 10 rue Amédée-Bonnet, 01500 Ambérieu-en-Bugey. 84 pages, 9 €. http://sitapa.free.fr

 

 

LES MOMENTS LITTERAIRES n° 15 et n° 16

Projet original que celui de cette belle revue semestrielle animée par Gilbert Moreau, d’une présentation sobre et classique, « à l’ancienne », qui privilégie l’écriture intime et publie journaux intimes, carnets, correspondances et récits autobiographiques… prolongeant chaque fois une riche réflexion sur la source et les rites de l’écriture. Des dossiers ont été consacrés à Annie Ernaux, Gabriel Matzneff, Hubert Nyssen, Charles Juliet, Henri Bauchau…

Le numéro 15 donne à lire un dossier Rezvani, avec une introduction de Bertrand Py, son nouvel éditeur, des extraits des Carnets de Lula, sa femme défunte, et une interview de l’auteur pleine de fulgurances : « Je ne prémédite pas mon travail. Je me sers de la peinture, de l’écriture ou même de la musique comme moyen d’extraction de ce qui se passe dans mon esprit. Ce qui m’intéresse, c’est ce que je ne sais pas. Du moment où l’on se met à écrire, il sort de vous des choses tout à fait inattendues. Dans une lettre à sa sœur, Kleist écrivait « les mots tirent la pensée. » C’est ça qui est passionnant. » Rezvani établit des rapprochements et des comparaisons entre les divers arts qu’il a pratiqués pour définir l’écriture : « Quand je me suis mis à écrire, je me suis cru délivré de la matérialité, je pensais pouvoir écrire dans un bistro, en voyage… En réalité, pas du tout, je me suis aperçu que l’écriture était beaucoup plus prenante, ritualisée, qu’elle vous enferme, vous rend maniaque. » et son approche de l’ordinateur et du traitement de texte est originale : « Depuis quelques années, je me suis mis à l’ordinateur. C’est un moyen extraordinaire. Etrangement je trouve que le travail d’écriture devient comme de la sculpture avec de la glaise. A l’ordinateur, les phrases deviennent une matière, il y a un côté plastique assez extraordinaire. » Signalons dans cette même livraison de savoureux portraits par Robin Wallace-Crabbe, peintre et écrivain australien.

Le numéro 16 est consacré à une longue expérience d’écriture à quatre mains (expression qui m’a longtemps hérissé du temps de l’écriture à la plume mais qui retrouve un peu de vérité avec l’écriture au clavier, le rapprochement avec le piano devenant légitime) menée par Daniel Zimmermann et Claude Pujade-Renaud. Une aventure bien exceptionnelle car l’écriture est par essence un exercice solitaire. Hugo Marsan présente l’histoire d’amour et de littérature de ce duo littéraire, « la danseuse et le funambule, la bourgeoise et le prolétaire ». Là aussi, une interview pleine d’enseignements sur les pratiques d’écriture en commun, conduite. par Gilbert Moreau, et illustrée par des extraits d’un « cahier des rêves ». Claude Pujade-Renaud revient sur la genèse de cette collaboration : « Nous avons continué à nous montrer les ébauches de ce que nous écrivions chacun de nôtre côté. L’essentiel était l’existence d’un destinataire immédiat, une écriture avec l’autre, pour l’autre et d’une certaine façon contre l’autre parce que, inévitablement, s’instaurait un rapport de rivalité, de défi. » Pour elle le travail d’écriture est « toujours très long, très laborieux » et est incomparable avec la musique : « dans l’écriture, le signifiant est là, bête, épais, incontournable. »

 

Les Moments littéraires, B.P. 175, 92186 Antony Cedex. 128 pages, 12 €

 http://perso.wanadoo.fr/les.moments.litteraires/